Les couacs autour de l’écriture inclusive sont nombreux. Une circulaire présentée par le Premier ministre Edouard Philippe le 21 novembre, a enjoint de bannir l’écriture inclusive des communications ministérielles. Ce document invitait les ministres, «en particulier pour les textes destinés à être publiés au Journal officiel de la République française, à ne pas faire usage de l'écriture dite inclusive». Toutefois, la circulaire recommande que l'ensemble des fonctions «tenues par une femmes [soit] systématiquement féminisé».
Le 15 novembre déjà, Jean-Michel Blanquer, le ministre de l'Education, avait donné le ton en fustigeant l'écriture inclusive à l'Assemblée, sous un tonnerre d'applaudissements. Plusieurs partisans de la réforme sont alors montés au créneau. A commencer par la Ville de Paris, qui ne compte pas se plier aux volontés d'Edouard Philippe. L’ancienne ministre des Droits des femmes, des Familles et de l'Enfance, Laurence Rossignol a jugé quant à elle le même jour que ce n'était pas le «rôle» du chef du gouvernement de statuer ainsi.
La Ville de Paris a décidé de garder l'écriture inclusive, malgré une interpellation le 21 novembre en séance du Conseil de Paris par l'élu Les Républicains (LR) Jean-Baptiste de Froment, qui avait demandé à la Ville de «renoncer» à l'écriture inclusive, afin de respecter l’injonction d’Edouard Philippe. «Nous sommes très loin de la cause, qui nous réunit tous, de l'égalité hommes-femmes [en utilisant cette graphie]», avait affirmé l'élu en estimant qu'on ne «comprenait rien» aux textes. L'écriture inclusive, qui compte gommer les stéréotypes sexistes, consiste à inclure le féminin, entrecoupé de point-médians, dans les noms, comme par exemple : agriculteur⋅rice⋅s.
Nous «gardons l'écriture inclusive. On comprend le français quand on écrit .e !», a rétorqué à l'AFP Hélène Bidard, adjointe communiste à la lutte contre les discriminations de la maire socialiste Anne Hidalgo. Elle a dénoncé au passage une «décision autoritaire» de la part de Matignon. Elle a informé qu’à la Ville, une circulaire demandait à l'administration de «visibiliser les femmes par l'écriture», mais laissait libre chacun d'utiliser ou non les graphies avec points.
Hélène Bidard s'est ensuite abondamment expliquée sur Twitter, critiquant le Premier ministre, qui «juge à 4 jours du 25 novembre contre les violences faites aux femmes, qu'il est urgent de les invisibiliser jusque dans les textes administratifs».
La Ville de Paris et ses adjoints ne sont pas les seuls à faire front. Le 22 novembre, l'ex-ministre Laurence Rossignol s'est dite «très étonnée» par la décision d'Edouard Philippe de bannir des textes officiels l'écriture inclusive. «Je pense que ce n'était pas son rôle», a-t-elle déclaré sur France Inter. Le ministère du Travail a publié début octobre un guide de bonnes pratiques pour aider les petites et moyennes entreprises à atteindre l'égalité professionnelle, qui préconise notamment d'écrire «les client.e.s».
Suite à la circulaire d'Edouard Philippe, Marlène Schiappa, la secrétaire d'Etat chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes, n'a pas commenté sur les réseaux sociaux. Mais elle a retweeté une longue interview accordée au site d'information Slate afin de préciser sa position. Elle y déclare : «J’aimerais qu’on puisse sortir du manichéisme, et du "pour ou contre".» Elle affirme en revanche être contre «l’enseignement du point médian à l’école».