Le 18 octobre dernier, Emmanuel Macron a déclaré, lors de son grand discours sur la sécurité, que la France n'appliquerait pas dans les armées une directive européenne encadrant le temps d'activité et de repos.
Adoptée en 2003, elle fixe des seuils à ne pas dépasser, hors opérations extérieures ou de guerre, notamment un repos minimal de 11 heures consécutives par tranches de 24 heures et une durée hebdomadaire maximale de travail de 48 heures. «Ma détermination est complète pour que aussi bien la gendarmerie que le ministère des Armées ne soient pas concernés par la directive bien connue. Les choses sont claires, notifiées à qui de droit, et seront portées jusqu'à leur terme», a déclaré le chef de l'Etat.
La gendarmerie nationale avait pourtant commencé à transposer la directive en septembre 2016 en mettant en œuvre la règle du repos journalier de 11 heures minimum. Interrogé le soir du 19 octobre par l'AFP, le général Richard Lizurey, patron des gendarmes, a tenu à affirmer qu'il n'y aurait pas de remise en cause de cette instruction provisoire. «L'instruction provisoire décidée en février 2016 et mise en place en septembre 2016 n'est pas remise en cause et fera l'objet d'une évaluation pour en préciser ou en aménager les modalités pratiques», a déclaré le général.
«Pour le reste des dispositions de la directive, le travail se poursuit sous la houlette du ministère des Armées», a-t-il ajouté.
La colère des militaires qui dénoncent une «Europe à la carte»
Les associations professionnelles nationales de militaires (APNM) ont également fait part de leurs craintes. L'APNM de gendarmerie GendXXI, qui avait déposé plainte en janvier 2016 devant la Commission européenne à ce sujet, a déploré une adhésion à l'Europe «à la carte». «La France ne peut pas prendre ce qui l'intéresse et laisser de côté les directives dérangeantes… Ceci au risque de créer une rupture d'égalité entre les citoyens et de générer du contentieux», a-t-elle mis en garde.
Le président de l'association ADEFDROMIL de défense des droits des militaires, Jacques Bessy, a jugé pour sa part «scandaleuse» la décision présidentielle. «Sans compensations sérieuses telles que le compte épargne temps, il y aura des problèmes. On va créer un mécontentement et là ce ne sera pas celui des officiers généraux», a-t-il déclaré à l'AFP.
Côté hiérarchie, le chef de l'armée de terre, le général Jean-Pierre Bosser, s'est en revanche réjoui de la non-mise en œuvre d'une directive qui aurait mis «sous forte contrainte les armées au plan des effectifs».
«Cette directive européenne a été imaginée en 2003 alors qu'on ne connaissait pas les menaces que l'on connaît aujourd'hui sur le territoire national», a-t-il déclaré lors d'une présentation des moyens de l'armée de terre à Versailles-Satory.
Interrogé le 19 octobre au soir par l'AFP, le ministère de l'Intérieur a affirmé que la transposition de la directive sur le temps de repos journalier de 11 heures au sein de la police nationale, mise en oeuvre en septembre 2017, «ne sera pas remise en cause».