Emmanuel Macron lance ce 17 octobre la concertation sur une nouvelle politique de lutte contre la pauvreté qui ciblera l'enfance et la jeunesse, lors d'un déjeuner avec les associations et la visite d'une crèche en banlieue parisienne.
Il nous faut investir socialement pour que les enfants qui sont pauvres, parce qu'ils sont dans des familles pauvres, ne soient pas les pauvres de demain
«Il nous faut investir socialement pour que les enfants qui sont pauvres, parce qu'ils sont dans des familles pauvres, ne soient pas les pauvres de demain, et éviter les facteurs de reproduction [sociale]», a expliqué l'Elysée, pour qui l'un des moyens mis en avant sera un enseignement précoce du langage.
Outre la date choisie, celle de la «Journée du refus de la misère», l'annonce paraît s'inscrire dans un timing parfaitement maîtrisé par celui qui se définit comme le «maître des horloges». Après la réforme du Code du travail, et en amont de celle de la formation professionnelle et de l'assurance chômage, Emmanuel Macron, qualifié de «président des riches» par ses détracteurs, se devait de mettre un coup de barre à gauche, ne serait-ce que pour faire oublier ses propos sur les «fainéants».
Un plan contre la pauvreté encore très flou
Pour autant, rien n'est véritablement défini pour l'instant. Le gouvernement veut d'abord passer par la concertation avec les acteurs de la lutte contre la pauvreté. Suivra ensuite une stratégie, à l'horizon de mars-avril 2017, accompagnée d'un plan d'action et d’éventuelles mesures législatives. Un délégué interministériel doit en outre être nommé pour piloter la mise en place du dispositif.
Le taux moyen de pauvreté en France – la proportion de personnes vivant avec moins de 60% du revenu médian national, soit 1 015 euros par mois – dépasse légèrement 14%. Mais il atteint près de 20% chez les enfants et les jeunes. D'après les chiffres de l'INSEE, 3 millions d'enfants, soit un sur cinq, vivent dans une famille dont les revenus sont située sous le seuil de pauvreté. De plus, d'après l'Elysée, 20% des étudiants sont pauvres.
Derrière les «premiers de cordées», ceux à qui la fortune a souri selon la métaphore pédagogique utilisée par le président de la République sur TF1 et LCI le 15 octobre dernier, Emmanuel Macron veut donc s'intéresser aux derniers, voire à ceux qui l'ont déjà lâchée.
La multinationale Danone comme partenaire ?
Mais la mode semble au partenariat public-privé et des sociétés privées seront sollicitées pour palier les manques d'un Etat providence qui semble être passé de mode.
Dans un courrier adressé à Emmanuel Macron, consulté par l'AFP, les co-présidents de l'association Action Tank Entreprise et Pauvreté, Martin Hirsch, directeur des Hôpitaux de Paris, et Emmanuel Faber, vice-président du conseil d'administration de Danone, dont la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, fut directrice des ressources humaines, proposent par ailleurs «un partenariat avec la puissance publique». Cette association regroupe une dizaine de grandes entreprises et conçoit des programmes pilotes visant à réduire les coûts de biens et de services pour les familles modestes, notamment l'accès aux lunettes, l'achat d'un véhicule ou encore l'alimentation infantile.
Certaines associations caritatives se montrent toutefois réservées sur l'efficacité de ces partenariats. «Sans des moyens financiers à la hauteur, cette concertation débouchera sur des vœux pieux ou sur des actions à faible portée dont les plus pauvres ne bénéficieront pas», a averti ATD Quart Monde, dans un communiqué.
Alexandre Keller