France

En colère, des élus de la Creuse retournent le portrait d’Emmanuel Macron dans leur mairie

Des élus de la Creuse, accablés par les coupes budgétaires, qui souhaitaient rencontrer Emmanuel Macron en visite dans leur région, ont été chargés par les CRS. Ils ont décidé de retourner son portrait dans leurs mairies. Un maire s'en explique.

«Il ne veut pas nous voir ? Et bien nous non plus, on ne veut pas le voir ! C'est symbolique», s'amuse Didier Martinez, maire depuis 2014 de Monteil-au-Vicomte, un village de la Creuse comptant 250 âmes, qui s'est confié à RT France. Avec son homologue du village de Chavanat, Guy Desloges, ils ont décidé de retourner le portrait d'Emmanuel Macron affiché dans leur mairie, n'étant pas légalement obligés de l'exposer dans leur bâtiment.

Le président les agace. Le 4 octobre, les deux hommes avaient rejoint un groupe de 40 maires bardés de leurs écharpes tricolores et de salariés de GM&S dans le village d'Egletons, en Corrèze. Ils souhaitaient approcher Emmanuel Macron venu inaugurer le nouveau campus d'EATP, une école de travaux publics. Mais la rencontre n'a pas eu lieu. Violemment repoussés par les CRS, aspergés de gaz lacrymogènes, les maires ont subi un véritable affront, comme on le voit dans une vidéo de France Bleu Limousin.

Aujourd'hui, ils ripostent avec leurs moyens. L'idée a été lancée le 6 octobre, lors d'une assemblée regroupant plus de 100 maires de la Creuse. «Cette proposition a été accueillie par des acclamations. c'est un peu potache, un peu gaulois», s'amuse-t-il.

Le blues des maires

Si Didier Martinez reste sur une note facétieuse, il n'en oublie pas ce qui l'a conduit à protester. «Le 4 octobre, nous portions deux discours. Primo, le soutien de GM&S, 150 personnes se retrouvent à terre. Secundo, on voulait lui parler de la perte des aides, des baisses de dotations, des difficultés à gérer ce pour quoi on a été élus», explique le maire à RT France.  

Les communes sont tout doucement étranglées. 

«Quand on a un budget de 400 000 euros, le moindre centime compte. On est ric-rac tout le temps», poursuit Didier Martinez. «Quand on nous coupe encore une aide, ça s’en ressent, par exemple, sur l’entretien d'une école. Tout se dégrade, alors que nous sommes responsables de l'entretien de tout !», se désole-t-il. «A l'époque, les routes étaient subventionnés à 80% et maintenant seulement à 30%, or un km de route coûte 70 000 euros. On avait aussi du soutien via les emplois aidés, l'Etat prenait en charge 70% du salaire et nous pouvions avoir du personnel communal. Mais ces emplois sont supprimés», se plaint-il.

Le maire s'inquiète vraiment pour l'avenir de sa commune. «Niveau taxe d'habitation, rien n'a augmenté depuis 15 ans. On se retrouve avec moins d’argent et la compensation est inexistante. Les communes sont tout doucement étranglées. Je ne comprends pas : on ne peut pas faire de déficit, on doit rendre de comptes à l'équilibre, alors que l'Etat n'a pas cette obligation», explique le maire de Monteil-au-Vicomte. Il est obligé d'exploiter le bois de la forêt communale pour que ses comptes soient à l'équilibre.

Les communes font de la résistance

Si le portrait retourné du président est une plaisanterie comme une autre, le ton risque de se durcir. «Bientôt nous tiendrons une assemblée générale des maires de la Creuse qui va décider de choses plus graves. Peut-être même que ce sera la fermeture des mairies au public», annonce Didier Martinez. Et le maire d'ajouter : «Le public pourra toujours faire ses démarches sur internet et nous serons physiquement présents. Mais la fermeture empêchera d’autres services de fonctionner, par exemple, on va arrêter d'envoyer les infos au comptable ou au receveur, qui scrutent nos comptes. Ils ne sauront plus ce qui rentre et ce qui sort, à part nos salaires.»

Didier Martinez attend aussi l'échéance du Congrès des maires à la porte de Versailles, le 21 novembre, et pressent que le ton va monter. «François Baroin [président LR de l'association des maires de France] y assistera, lui aussi est agacé par les coupes budgétaires, qui ont commencé avant le quinquennat d'Emmanuel Macron mais se poursuivent aujourd'hui», explique-t-il. En outre une délégation d’élus creusois sera reçue à l'Elysée le 17 octobre.

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