France

Nouvelle norme halal : un marché juteux, déjà contesté par le CFCM

Alors que l'Afnor publie une norme halal inédite, le Conseil français du culte musulman nie avoir été consulté et s'insurge. Le halal, un marché de 5,5 milliards d'euros par an, représente un enjeu commercial majeur en France.

Le 15 septembre, l’Association française de normalisation (Afnor) lance à titre expérimental pour trois ans une norme halal sur laquelle elle dit avoir travaillé en concertation avec les autorités religieuses musulmanes de France. La norme est volontaire et non obligatoire, mais les critiques fusent déjà du côté du Conseil français du culte musulman (CFCM), qui assure qu'il n'a pas été consulté.

L'abattage rituel au cœur de la bataille

Au cœur de la discussion, c'est surtout la question de l'abattage rituel qui fait débat : la norme halal (licite, en arabe) proposée par l'Afnor ne couvre que la partie aval de la filière : de la matière brute au produit transformé (conserves, plats préparés et confiserie), mais pas l'abattage sans étourdissement que garantissent traditionnellement les sacrificateurs halal.

Le recteur de la grande mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, critique la démarche de l'Afnor qui, selon lui, n'est rien d'autre qu'un «organisme laïc et civil» qui «se pare des attributs de délivrance de licéité cultuelle». Le CFCM dénonce une «manœuvre d'ingérence par l'Afnor dans la définition du halal».

Nadine Normand, responsable du département agroalimentaire de l'Afnor, citée par L'Express, défend quant à elle une norme qui permettrait aux fabricants de disposer d'éléments qui les aideraient à organiser leurs productions afin de mieux prendre en compte les exigences de leurs clients. Car, initialement, c'est bien le secteur agroalimentaire français qui a réclamé cette nouvelle norme halal.

5,5 milliards d'euros par an : un marché juteux

L'anthropologue Florence Bergeaud-Blackler, spécialiste du marché halal et membre de la commission de normalisation de l’Afnor, citée par L'Express, estime pour sa part que les autorités du CFCM «font semblant de dénoncer un dispositif auquel ils ont participé et qu'ils n'ont pas dénoncé plus tôt, pour tenter de le contrôler». Il s'agit effectivement d'un marché important, qui a été estimé à 5,5 milliards d'euros en 2010.

Florence Bergeaud-Blackler s'inquiète cependant de l'avenir de ce label en France et de cette extension de la normalisation au domaine du culte : «La France aura sa norme halal, ce qui est quand même préoccupant.»

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