Le 4 juillet, les sénateurs étaient appelés à se prononcer sur la prolongation de l'état d'urgence après le discours de politique générale du Premier ministre Édouard Philippe. 312 sénateurs ont voté pour et 24 contre. Le texte devrait être définitivement adopté le 6 juillet par l'Assemblée nationale.
«Je rétablirai les libertés des Français en levant l’état d’urgence à l’automne, parce que ces libertés sont la condition de l’existence d’une démocratie forte», a fait valoir le 3 juillet Emmanuel Macron devant le Parlement réuni en congrès, rappelant que les deux chambres seraient appelées à voter des mesures nouvelles contre le terrorisme.
Une nouvelle «loi antiterroriste» à la place
Ces mesures feront partie d'un projet de loi «renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme», qui prendra donc le relais de l'état d'urgence et pérennisera certaines mesures exceptionnelles en les inscrivant dans le droit commun.
«Aujourd'hui, nous vous proposons de prolonger à nouveau l'état d'urgence pour pouvoir étudier le nouveau texte dans les meilleures conditions», a souligné devant les sénateurs le ministre de l'intérieur Gérard Collomb.
«Nous le reconduisons pour la sixième fois depuis la funeste nuit du 13 novembre 2015, non parce que nous nous serions laissés emporter par une dérive sécuritaire, mais parce que, à chaque fois que nous avons voulu y mettre fin, de nouvelles menaces ont exigé son maintien», a-t-il ajouté.
Le Sénat en séance a rejeté les deux amendements déposés sur le texte, un socialiste, et un autre du groupe communiste, citoyen et républicain demandant son retrait. «C'est la 6e fois que j'interviens sur la prolongation de l'état d'urgence», a dit sa présidente Eliane Assassi. «Triste record quand on sait que l'état d'urgence est un état d'exception», a-t-elle ajouté.
Mais avant d'arriver en commission, le gouvernement avait dû amender son texte après la censure par le Conseil constitutionnel d'une de ses dispositions initiales, largement utilisée au moment des manifestations contre la loi travail. Celle-ci permettait aux préfets d'«interdire le séjour» à certains endroits et à certaines dates de personnes «cherchant à entraver l'action des pouvoirs publics».
La gauche craint et dénonce un «état d'urgence permanent»
Selon Amnesty international, 639 mesures de ce type ont été prises «explicitement» pour «empêcher des personnes de participer à des manifestations» contre la loi travail et à l'occasion de la COP21 notamment.
Au Conseil constitutionnel, les Sages ont estimé que le pouvoir donné aux préfets était trop étendu et «devait être assorti de davantage de garanties».
Le gouvernement a donc déposé un amendement permettant aux préfets «d'interdire le séjour dans tout ou partie du département à toute personne à l'égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics». L'arrêté doit notamment préciser la durée de la mesure dans le temps et les circonstances qui la motivent.
«Avec cet amendement, on met dans la loi les conditions et les garanties exigées par le Conseil constitutionnel», a estimé le rapporteur centriste au Sénat, Michel Mercier.
Par ailleurs, le 4 juillet, des députés LR, de la France insoumise et aussi un élu de La République en marche se sont élevés en commission contre les conditions d'examen du projet de loi.
De son côté, le projet de loi antiterroriste sera débattu en séance publique au Sénat à partir du 18 juillet, avant un probable examen à l'Assemblée nationale en octobre.
Présenté peu après un attentat manqué sur les Champs-Élysées, il permettra selon Gérard Collomb «un véritable équilibre entre une nécessaire sécurité de nos concitoyens et la protection des libertés individuelles».
Mais, pour ses détracteurs, il fait entrer l'état d'urgence dans le droit commun.
Le 1er juillet, plusieurs centaines de personnes ont manifesté à Paris pour protester contre le projet gouvernemental à l'appel d'un collectif rassemblant des syndicats (Syndicat de la magistrature, Solidaires, Sud), des associations et le PCF.
Selon le texte, l'exécutif entend confier de manière permanente aux préfets et au ministre de l'Intérieur le pouvoir d'assigner des individus dans un «périmètre géographique déterminé» et de perquisitionner de jour comme de nuit, deux mesures jusqu'ici indissociables de l'état d'urgence.