L'alliance avec des personnalités ou des dirigeants d'autres formations politiques est un écueil historique du Front national (FN). La diabolisation dont le parti fait encore l'objet rebute en effet nombre de personnalités qui seraient tentées de franchir le Rubicon. Pourtant, alors qu'elle vient de faire son entrée à l'Assemblée Nationale, Marine Le Pen assure, sur le plateau de Jean-Jacques Bourdin dans la matinée du 28 juin, qu'elle sera en mesure de réunir au moins 15 députés pour créer un groupe parlementaire «dans le courant du mandat»... alors que seuls huit membres du FN ont été élus à la chambre basse du Parlement.
«Sur le coup, on y arrive pas, tout le monde est pris en main, et puis, au fur et à mesure, on s'aperçoit que des gens se sentent plus proches de ce que vous défendez», a ainsi déclaré la présidente frontiste. En d'autres termes : des personnalités hors FN, a priori donc de droite, pourraient rallier le groupe frontiste à l'Assemblée, à en croire l'ex-candidate à la présidentielle.
Une alliance avec des élus LR ?
Fin mars déjà, selon Le Figaro, une note interne du FN préconisait de «soutenir» 19 élus de droite, tels que Nicolas Dupont-Aignan (Debout La France), Jean-Frédéric Poisson (Parti chrétien-démocrate), Thierry Mariani (LR), Alain Marsaud (LR), Jacques Myard (LR), Henri Gaino (LR) ou encore le député de la Ligue du Midi Jacques Bompart, car susceptibles selon le parti de contracter des alliances. Depuis cette date, néanmoins, nombre de ces élus n'ont pas été reconduits dans leur mandat, tandis que d'autres ont rejeté purement et simplement l'idée d'un tel rapprochement.
Du côté des républicains, l'opposition au FN est toujours sans ambiguïté à la tête du parti. Ainsi, François Baroin, le chef de file LR depuis le retrait de François Fillon, préconisait des désistements mutuels face au FN avant les législatives et estimait qu'un partage du pouvoir avec Emmanuel Macron n'aurait «rien de conflictuel».
Cette position ne fait cependant pas tout à fait l'unanimité dans son camp. Dans un entretien accordé le 27 juin à l'hebdomadaire Minute, l'ex-député LR Thierry Mariani ne s'est pas montré franchement hostile à un rapprochement avec des personnalités du FN. Si l'ancien député estime qu'il est encore «trop tôt» pour cela, il pense qu'il est «évident qu'il y a quelques barrières à casser, non pas en terme de partis, mais en terme de personnes». Il a ensuite précisé que le «danger en France, aujourd'hui, ce n'[était] pas le Front national, c'[était] l'islamisme».
Dans la même journée, il a déclaré à L'Opinion, cette fois : «Les gens qui sont au FN ne sont pas radioactifs.» Il a pour autant rejeté l'idée d'un alliance formelle avec le FN dans son ensemble car «c’est une phrase taboue ; si on la prononce, on est mort en cinq minutes».
Globalement, l'écart semble se creuser de plus en plus entre la droite du parti, hostile aux partisans d'Emmanuel Macron, et une partie des cadres plus favorable au nouveau président. L'élection du prochain président du parti, (à laquelle Thierry Mariani n'exclut pas de se présenter), rebattra sûrement les cartes et donnera peut-être à Marine Le Pen la chance de réussir son pari de rallier des personnalités de droite pour former un groupe parlementaire. Il est néanmoins à noter que Laurent Wauquiez, qui entend incarner l'aile droite des Républicains, rejette catégoriquement l'idée de toute forme d’alliance avec le FN.