«Le référendum est une décision du président de la République sur proposition du Premier ministre. A partir du moment où Marine Le Pen [si elle était élue présidente le 7 mai] demanderait un référendum visant à modifier le mode de scrutin aux législatives pour une proportionnelle intégrale, celui-ci pourrait être tenu. La seule obligation qui incomberait à l'exécutif serait de faire un débat à l'Assemblée nationale», explique Michel Lascombe, professeur de droit constitutionnel à Science Po Lille et co-auteur du livre Le droit constitutionnel de la Ve République.
«La question est de savoir ce que l’on appelle un débat au Parlement après la décision de demander un référendum. Est-ce que le simple fait que cela soit inscrit à l'ordre du jour et que cela soit discuté une minute trente, suffit ?», poursuit-il au sujet de la proposition de la candidate d’introduire la proportionnelle intégrale «avec une prime majoritaire de 30% des sièges pour la liste arrivée en tête».
Dans un article publié le 3 mai, le Canard enchaîné, citant Gilles Lebreton, membre du conseil stratégique de Marine Le Pen, laissait entendre que si la candidate accédait à la présidence sans obtenir de majorité aux législatives de juin, elle ferait revoir la loi électorale. «Si la nouvelle Assemblée nous est hostile, nous changerons la loi électorale par un référendum organisé dès l'été prochain, puis la présidente dissoudra l'Assemblée», déclarait ce dernier.
L’opposition pourrait-elle empêcher un référendum ?
Si Marine Le Pen devenait présidente et obtenait une majorité aux élections législatives, il n’y aurait a priori pas d’obstacle à la réforme prônée. Toutefois, en cas de gouvernement d’opposition, la question se poserait.
«Dans ce cas-là, Marine Le Pen disposerait toujours de la possibilité de dissoudre l'Assemblée nationale», note Michel Lascombe.
Quant au Conseil constitutionnel, il s'est «toujours déclaré incompétent» pour empêcher la tenue d’un référendum, explique le professeur. «Il se déclare incompétent avant la tenue du débat sur le référendum au Parlement, ainsi qu'après sa tenue, puisqu'il estime que le peuple a tranché et qu'il ne peut pas toucher à sa décision», estime le professeur.
Une solution probable ?
«La tenue d'un référendum sur la proportionnelle est politiquement réaliste mais je n'y crois pas une seconde», explique Michel Lascombe. «Cela partirait d'abord du principe que Marine Le Pen est élue présidente de la République, ce qui ne semble pas très bien engagé pour elle», poursuit-il.
Ensuite, ce scénario voudrait que la candidate, hypothétiquement élue, ne dispose pas de la majorité à l'Assemblée, juge le professeur. Or, selon lui, il n’est pas impossible qu'elle puisse, le cas échéant, obtenir une «majorité de circonstance» sur la question de la proportionnelle, avec d'autres formations qui y sont favorables, comme les Verts ou les Insoumis.
«Ainsi, si Marine Le Pen était présidente et même sans majorité du Front national à l'Assemblée, ne serait-elle pas capable de faire valider cette proposition par voie parlementaire ?», s'interroge-t-il.
Une question qu'il sera toujours temps d'aborder le 7 mai à 20h01 pour la candidate, toujours donnée perdante par les sondages face à Emmanuel Macron.