France

Ils se font (encore) passer pour Le Drian et arnaquent un industriel pour des millions d’euros

Mettant en scène des scénarios de prises d’otage et demandant au ministre de la Défense de payer discrètement des rançons, des escrocs ont une nouvelle fois soutiré de l’argent à une victime. La justice enquêtait déjà sur des faits similaires.

Se faisant passer pour des émissaires du ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, un groupe d’individus a escroqué un riche industriel étranger de plusieurs «dizaines de millions d'euros». Rentrant d'abord en contact avec lui par téléphone, celui-ci a ensuite reçu un faux courrier prétendument signé par le ministre.

Dans la plupart des cas, ces escroqueries passent par des scénarios élaborés de prises d'otage, qui nécessitent le paiement discret de fortes sommes d'argent à la place de la France, dont la ligne officielle est de ne pas céder aux demandes de rançons.

Comme le récit des escrocs fait intervenir des agents secrets, il est demandé à la riche victime de rester discrète pour des raisons de sécurité et de virer rapidement l'argent sur des comptes dans des paradis fiscaux.

Des juges d'instruction ont été saisis en avril 2016 à Paris après de précédents cas, qui avaient touché des présidences d'Etats africains, des ambassades, des entreprises françaises, fondations ou associations humanitaires. L'enquête, confiée à l'Office central de répression de la grande délinquance financière (OCRGDF) a été élargie aux faits de décembre.

D'après une source judiciaire, le ministère de la Défense a signalé 180 faits depuis août 2015. La plupart du temps, il ne s'agit que de tentatives, «mais il y a des faits consommés», indique cette source.

Une spécialité israélienne 

Ce genre d'escroquerie s'inspire de la «fraude au président», ou «fraude aux faux ordres de virements», un classique où les malfaiteurs se font généralement passer pour le patron d'une entreprise pour se faire transférer de grosses sommes d'argent par des collaborateurs.

Les enquêteurs soupçonnent des escrocs israéliens ou franco-israéliens installés en Israël d'en avoir fait une spécialité. Le pionnier de ces arnaques, Gilbert Chikli, qui a fui dans ce pays en 2009, a été condamné en 2015 à sept ans de prison et un million d'euros d'amende par le tribunal correctionnel de Paris, pour des faits commis en 2005 et 2006.

En mars 2016, le procureur de la République de Paris, François Molins, avait chiffré à 500 millions d'euros depuis 2010 le préjudice causé par ces escroqueries.