«Je connais parfaitement les effets pervers du 49.3. Dans la société de la participation dans laquelle nous vivons, son utilisation est devenue dépassée et apparaît comme brutale. Je proposerai, hors texte budgétaire [...], de supprimer purement et simplement le 49.3», a déclaré Manuel Valls au micro de France Inter, dans la matinée du jeudi 15 décembre. Une mesure surprenante, qu'il envisagerait d'adopter par voie de référendum : «Il faudra engager très vite cette réforme. A la rentrée 2017, avec le Parlement, soit à travers le Congrès, soit en consultant directement le peuple, et c'est sans doute la bonne solution», a-t-il en effet indiqué.
L'article en question, inscrit dans la Constitution française, permet au Premier ministre d'engager la responsabilité du gouvernement devant l'Assemblée nationale, afin de faire passer un texte de loi : celui-ci est adopté sauf si une motion de censure, déposée dans les 24 heures, est votée par les députés. La motion de censure est ensuite débattue, et dans le cas où elle es approuvée par la majorité absolue de la chambre basse du Parlement, le gouvernement doit présenter sa démission.
Une arme constitutionnelle redoutable, que Manuel Valls n'a pas hésité à employer à six reprises, alors qu'il était Premier ministre, afin de faite adopter les projets de loi controversés Macron et «El Khomri» (la fameuse loi travail).
Réactions surprises et indignées à gauche
Interrogé au micro de Jean-Jacques Bourdin sur BFM TV et RMC sur l'étonnante déclaration de l'ex-Premier ministre, le porte-parole du gouvernent Stéphane Le Foll a semblé pris au dépourvu : «Il faut faire preuve de lucidité», a déclaré le ministre de l'Agriculture, avant de se dire favorable à une restriction du 49.3 et «surpris» que Manuel Valls veuille le supprimer.
L'ex-porte-parole du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) s'est montré beaucoup moins tendre avec l'ancien chef du gouvernement, se demandant ironiquement sur Twitter si celui-ci allait également faire marche arrière sur la loi travail... et adopter le slogan «Valls démission», que les opposants à ce projet de loi avaient scandé durant les mobilisations du printemps dernier !
Même réaction de la part du sénateur Europe Ecologie Les Verts (EELV) Esther Benbessa, qui a tweeté avec sarcasme : «Et la loi travail, il veut l'abroger aussi ?»
La référence à la loi El Khomri était également présente dans le tweet de Pierre Laurent, secrétaire national du Parti communiste français (PCF), qui a estimé que Manuel Valls ne «manquait pas d'air» en proposant de supprimer le 49.3.
La «schizophrénie» de Valls tournée en dérision par la droite
A droite, le compte officiel sur Twitter du parti Les Républicains (LR) a moqué la «schizophrénie» de Manuel Valls, rappelant le nombre de fois où l'ex-Premier ministre a eu recours au 49.3.
Issu des rangs de cette formation politique, le Hervé Mariton n'a pas raté le candidat à la primaire de la gauche, l'accusant sur France Info d'inconstance et d'hypocrisie.
Similairement, le leader du mouvement Debout la France (DLF), Nicolas Dupont-Aignan, a dénoncé l'«amnésie» de Manuel Valls, qui a usé «brutalement» du fameux article constitutionnel lorsqu'il dirigeait le gouvernement français.
Amer, le souverainiste s'est également interrogé : «Utilisera-t-il le 49.3 comme à son habitude [pour supprimer le 49.3]» ?