La phrase de François Hollande, rapportée par les journalistes Gérard Davet et Fabrice Lhomme dans l'ouvrage Un président ne devrait pas dire ça..., à paraître bientôt aux éditions Stock, a de quoi faire des étincelles : «La femme voilée d'aujourd'hui sera la Marianne de demain.»
Le propos est tiré d'un passage cité en exclusivité par L'Express le mardi 11 octobre, dans lequel le président de la République s'épanche longuement sur son rapport à la laïcité, à l'identité et à l'islam – questions particulièrement brûlantes dans la France actuelle.
Evoquant la mobilisation par Nicolas Sarkozy d'une laïcité qui serait hostile à l'islam, le chef d'Etat souligne qu'il ne s'agit pas selon lui de la conception authentique du principe de laïcité, puis suggère que la question du vêtement islamique représente un faux problème : «Je pense que, le sujet, il est par rapport aux Français : qu'est-ce qui fait que nous sommes, en France, même si nous habitons des territoires différents, liés par quelque chose qui nous dépasse ?»
Pour Hollande, les femmes voilées deviendraient françaises... en se dévoilant
Le président socialiste révèle ensuite sa vision de la femme voilée en France, vouée selon lui à se fondre pleinement dans la société si les valeurs de liberté et de tolérance étaient développées : «D'une certaine façon, si on arrive à lui offrir les conditions pour son épanouissement, elle se libérera de son voile et deviendra une Française, tout en étant religieuse si elle veut l'être, capable de porter un idéal. Finalement, quel est le pari que l'on fait ? C'est que cette femme préférera la liberté à l'asservissement. Que le voile peut être pour elle une protection, mais que demain elle n'en aura pas besoin pour être rassurée sur sa présence dans la société.»
En d'autres termes, si l'on prend le chef d'Etat au pied de la lettre, une musulmane portant le voile islamique ne peut pas être française – puisqu'elle «deviendra une Française» en s'en débarrassant. Un message relevé, notamment, par la journaliste de Mediapart Faïza Zerouala.
«Hollande à la pêche de l'électorat religieux extrémiste !»
Des personnalités politiques ont interprété de manière tout à fait différente les propos de François Hollande sur Marianne, y voyant un éloge du voile islamique. Ainsi, le député-maire Les Républicains (LR) Lionnel Luca a décrié l'«aveu de renoncement» du chef de l'Etat.
De même, l'eurodéputé du Front national (FN) Louis Aliot a perçu dans les mots de François Hollande un moyen d'aller «à la pêche de l'électorat religieux extrémiste», et a même évoqué un «grand remplacement électoral pour la gauche» (sous-entendu, une substitution des électeurs musulmans aux Français non-musulmans).
Marianne voilée : un symbole déjà évoqué par Valeurs actuelles... et Manuel Valls
Cette idée de Marianne voilée, que semblent déceler les deux responsables politiques dans la phrase controversée du président de la République, n'est pas sans rappeler une couverture de 2014 de l'hebdomadaire Valeurs actuelles – qui avait valu à son directeur de publication une condamnation à 2 000 euros d'amende pour provocation à la discrimination envers les musulmans.
En outre, cette image avait été évoquée en août dernier lors d'un meeting par le Premier ministre Manuel Valls, qui avait rappelé que Marianne n'était pas voilée mais arborait un sein nu, «parce qu'elle est libre !». Avant d'ajouter : «C'est ça la République ! C'est ça Marianne !»
Lire aussi : Chevènement conseille aux musulmans de se faire discrets, la twittosphère s'enflamme