France

Chevènement conseille aux musulmans de se faire discrets, la twittosphère s'enflamme

Au cours d'une même interview, l'ex-ministre a donné son accord formel pour prendre la tête de la Fondation pour l'islam et a suggéré aux musulmans de se faire «discrets», provoquant de vives réactions sur Twitter.

Pressenti pour prendre les rênes de la Fondation pour l'islam, une organisation publique qui sera notamment chargée de régler des questions brûlantes telles que le financement de la construction des mosquées et la formation des imams, Jean-Pierre Chevènement a donné son accord formel lundi dans les colonnes du Parisien.

L'ancien ministre socialiste n'a pas attendu d'être nommé à la direction de l'organisme, dont la création est prévue depuis dix ans, pour livrer ses premières recommandations sur le thème de l'islam en France. «Les musulmans, comme tous les citoyens français, doivent pouvoir pratiquer leur culte en toute liberté. Mais il faut aussi qu'ils comprennent que, dans l'espace public où se définit l'intérêt général, tous les citoyens doivent faire l'effort de recourir à la "raison naturelle"», a notamment expliqué l'ancien leader du Mouvement républicain et citoyen (MRC). Et de préciser, à l'attention des Français musulmans : «Le conseil que je donne dans cette période difficile – comme le recteur de la mosquée de Bordeaux – est celui de discrétion.»

La déclaration est loin d'être passée inaperçue, un certain nombre de politiques et journalistes la jugeant dérangeante ou déplacée.

Le président et cofondateur du site Mediapart, Edwy Plenel, par exemple, a regretté des propos qui reviendraient selon lui à demander aux musulmans de se faire invisibles.

La sénatrice centriste Nathalie Goulet a fait part de son scepticisme au sujet de la probable nomination de Jean-Pierre Chevènement à la tête de la Fondation pour l'islam, au regard de ses propos controversés.

Un élu du Front de Gauche, également, a ironisé sur l'exhortation à plus de discrétion adressée aux musulmans – et a remis en question la légitimité de l'ancien ministre à diriger un organisme public gérant les relations entre la République et l'islam.

Du côté du FN, à l'inverse, un conseiller régional de Bourgogne Franche-Comté et assistant parlementaire de Sophie Montel (membre du bureau du parti) a salué «l'esprit de la laïcité» dont ferait preuve la déclaration de Jean-Pierre Chevènement.

«Pourquoi ne pas leur demander de disparaître !»

Les réactions des internautes, sur les réseaux sociaux, étaient majoritairement partagées entre sarcasme et indignation.

Certains utilisateurs de Twitter ont décrié une manière dégradante ou paternaliste de s'adresser aux musulmans, l'un d'eux comparant même la déclaration de l'ancien ministre à la fameuse tirade de Jacques Chirac sur «le bruit et l'odeur», à propos des immigrés africains.

D'autres ont regretté que cette déclaration s'inscrive dans un contexte particulièrement tendu pour la communauté musulmane – celle-ci, selon ces internautes, ayant été ciblée par de nombreuses polémiques au cours des dernières semaines (comme celle du «burkini»), tout en peinant à faire entendre sa voix dans le débat public.

Certains internautes, toutefois, ont souhaité souligner le caractère modéré de l'ancien ministre dont les propos, selon eux, ne stigmatisent pas la communauté musulmane.

Lire aussi : Lutte contre la radicalisation : une taxe sur les produits halal pour financer le culte musulman