Des effectifs de police limités
Le président Les Républicains (LR) de la région Paca et ancien maire de Nice, Christian Estrosi, l'affirme depuis le lendemain de l'attaque au camion : les effectifs de police déployés à Nice le soir du 14 juillet, durant lequel un attentat a fait 84 morts et de nombreux blessés, étaient insuffisants. L'ex-ministre de Nicolas Sarkozy assure que, ce soir-là, on «était très loin du chiffre [...] de 64 policiers» nationaux, 42 policiers municipaux et 20 militaires de la mission Sentinelle annoncé par le gouvernement deux jours après le massacre.
La thèse d'un sous-effectif des forces policières le soir de la tuerie à Nice a été confirmée par le Canard enchaîné du mercredi 20 juillet, qui s'est procuré les comptes-rendus de deux réunions de la préfecture des Alpes-Maritimes, du 28 juin et du 7 juillet, durant lesquelles la sécurisation de la fête nationale a été planifiée. D'après le journal, la préfecture a évoqué durant ces réunions des «effectifs de police municipale et de police nationale contraints» dans la ville.
Dans la même veine, le maire (LR) de Cannes David Lisnard, dans le même département, s'est plaint le 19 juillet d'avoir moins de policiers nationaux et de moyens consacrés à la sécurité en ce moment qu'avant l'état d'urgence...
L'abandon du filtrage du public
Du fait de ces effectifs limités, la préfecture a décidé, toujours selon le Canard enchaîné, d'abandonner ou de limiter certains éléments du dispositif de sécurité à Nice. Ainsi, les autorités ont décidé de renoncer à l'idée de filtrer le public se rendant sur la Promenade des Anglais – une décision, toutefois, qui n'a pas eu de conséquences sur l'attaque au camion.
Des barrages incomplets
Si l'installation de barrières a bien été validée par la préfecture des Alpes-Maritimes, celle-ci n'a pas demandé à la ville de Nice d'installer des chicanes en béton (de gros blocs), dont disposait pourtant la mairie. Au lieu de ce dispositif qui aurait stoppé ou du moins ralenti la course du véhicule meurtrier, la préfecture a préféré opter pour le déploiement de cars de CRS et de voitures de police sur la chaussée.
Une seule voiture de police municipale barrait l'avenue
Or, selon Libération, le nombre des véhicules policiers déployés s'est limité à... un ! Le journal, qui se base sur une source policière ayant pu visionner des images de vidéosurveillance de la Promenade des Anglais, affirme qu'«un seul véhicule de police, celui des agents municipaux, se trouvait au milieu de la chaussée, côté mer».
Les policiers nationaux, qui devaient épauler la police municipale, étaient absents de l'avenue niçoise au moment du drame : d'après un témoin cité par Libération, les membres de la police nationale «ont été relevés aux alentours de 20h30 par leurs collègues municipaux. Il n’y a[vait] donc aucune voiture de police nationale susceptible de barrer la chaussée».
Une version qui dément celle de la préfecture des Alpes-Maritimes, qui assurait, deux jours après la tuerie, que la police nationale s'était vu confier la mission de veiller sur «les points les plus sensibles» de la Promenade des Anglais, tels que «le point d’entrée du camion».
Le poids lourd de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel n'avait pas le droit d'entrer à Nice
Cerise sur le gâteau : France Bleu a révélé le 19 juillet que le camion de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel n'aurait jamais dû pouvoir ne serait-ce qu'entrer dans la ville de Nice, le soir du 14 juillet. En effet, un arrêté préfectoral valable à l'échelle nationale interdit aux véhicules de plus de 7,5 tonnes de circuler «sur l'ensemble du réseau routier […] les veilles de jour férié de 22h à 22h le lendemain».
En plus de cette interdiction, un arrêté municipal permanent, acté par Christian Estrosi lui-même le 29 septembre 2014, interdit la circulation des poids lourds de plus de 3,5 tonnes dans la ville de Nice.
Le maire de Nice, Philippe Pradal, a expliqué que certaines dérogations pouvaient être accordées concernant l'arrêté municipal en cas de livraison ou de déménagement. Néanmoins, cela n'explique pas pourquoi des agents municipaux n'ont pas été dépêchés pour contrôler le camion lors du premier passage du terroriste près de la Promenade des Anglais, avant qu'il ne revienne pour passer à l'acte.
De plus, personne n'a exigé du chauffeur, qui a prétexté devoir livrer des glaces sur l'avenue niçoise – alors même que son camion n'était pas frigorifique selon des professionnels du secteur interrogés par France Bleu – qu'il présente son bon de livraison.