En juin 2009, Asma Bougnaoui, a été licenciée de la société française de consultance informatique Micropole Univers, dans laquelle elle travaillait depuis un an.
Elle avait participé, voilée, à une réunion d’affaire avec des clients d’une grande société d’assurance, qui s’était ensuite plainte que le foulard avait «embarrassé» des membres de son staff.
La direction de Micropole Univers avait alors demandé à Bougnaoui de retirer son voile pour les futures réunions commerciales, ce que l’employée a refusé, avant d’être limogée dans la foulée. S’estimant dans son droit, elle a saisi la justice française pour licenciement abusif.
Mais si le tribunal des prud'hommes, de même que la Cour d’appel, ont estimé que son licenciement était basé sur une «cause réelle et sérieuse», la Cour de cassation a elle demandé l’éclairage de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) avant de trancher.
Il s’agissait de savoir si le fait d’exiger le retrait du voile islamique constituait «une exigence professionnelle essentielle et déterminante» pour l’entreprise ou, au contraire, une discrimination basée sur la religion, qui est elle interdite par une directive européenne.
C’est finalement ce dernier motif qui a été retenu, à titre préliminaire, par l’avocate générale britannique de la CJUE Eleanor Sharpston. Si la Cour européenne doit encore confirmer cet avis préliminaire dans un jugement définitif, il est très rare que l’un contredise l’autre.
Quelle qu'elle soit, la décision devra être appliquée par la justice française, puisque les verdicts de la CJUE sont juridiquement contraignants pour tous les Etats membres de l’Union.
Une décision contradictoire ?
Moins de deux semaines avant le cas d'Asma Bougnaoui, l'affaire similaire d'une réceptionniste belge licenciée pour avoir refusé de venir travailler sans son voile, avait été portée devant les tribunaux européens, résultant en un avis préliminaire totalement différent.
En effet, l'avocate générale allemande de la CJUE chargée de cette dernière affaire, Juliane Kokott, avait estimé qu'une interdiction du voile, à condition que tout autre signe religieux soit également proscrit, pouvait «être justifiée afin de faire respecter une politique légitime de neutralité religieuse et idéologique menée par l'employeur.»
Il s'agissait également, contrairement à l'avis rendu par Eleanor Sharpston, d'éviter qu'un attirail religieux ait «un impact [...] sur l'image de l'entreprise».
En France, le port du niqab, ou voile intégral, est prohibé dans les espaces publics. Les employés du secteur public doivent donc s’abstenir de tout signe religieux visible. Dès lors, une infirmière musulmane devra enlever son voile avant d’arriver au travail.
La réglementation du secteur privé est, à cet égard, plus floue. Plusieurs plaintes pour discrimination ont ainsi été déposées devant des tribunaux français par des employées voilées s'estimant victimes de discrimination.
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