Lundi 29 février
Quinze évêques se sont rendus lundi au Salon de l'agriculture pour manifester leur «attention» au monde agricole et ne pas «laisser seuls» les paysans, une visite inédite en pleine crise du secteur en France.
En tenue civile, si ce n'est le col romain pour certains, la délégation d'évêques a commencé dans la matinée à déambuler discrètement dans les allées du salon qui attire chaque année des centaines de milliers de visiteurs.
Les prélats se sont rendus sur le stand de la FNSEA, le premier syndicat agricole français, où ils ont eu un échange avec son président Xavier Beulin. Ils ont aussi visité le stand de la Confédération paysanne et celui de l'enseignement agricole.
«Les agriculteurs ont besoin de sentir que l'opinion est auprès d'eux», a affirmé Mgr Philippe Mousset (Périgueux), qui a conduit la délégation des évêques au Parc des expositions. «Il ne faut pas les laisser seuls se dépatouiller avec une vision unilatérale du productivisme industriel».
«L'agriculture pose la question du mode de vie, du mode de consommation et du mode sociétal que nous voulons. En ce sens, les agriculteurs ont un rôle important à jouer», a-t-il poursuivi devant des journalistes.
«Bravo les évêques!», s'est écriée une femme parmi les visiteurs après ces paroles.
«Nous ne sommes pas dans une logique de récupération ou de prosélytisme. Il y a aujourd'hui beaucoup de désespoir et d'inquiétude par rapport à l'avenir... Cela rejoint l'attention du pape François sur la question environnementale et agricole», a commenté Mgr Jean-Marc Eychenne (Pamiers), ajoutant que l'Eglise ne pouvait «pas être absente de ces débats de société».
Venant de diocèses majoritairement ruraux dispersés dans une dizaine de régions, les prélats doivent passer la journée au salon, visiter une ferme de productions végétales, rencontrer les paysans de leurs départements, avant de célébrer ensemble une messe dans la proche église Saint-Antoine-de-Padoue.
«La vache sacrée, c'est Bruxelles», a dénoncé lundi le numéro 2 du Front national Florian Philippot, regrettant que «cette vache sacrée compte plus que nos agriculteurs».
«La colère agricole on ne peut que la comprendre [...] parce que ça fait des années et des années que les responsables politiques de droite et de gauche arpentent ce salon pour ne rien annoncer, rien annoncer de nouveau, si ce n'est de vagues promesses», a déclaré l'eurodéputé au micro de Sud Radio et Public Sénat, depuis le Salon de l'Agriculture.
«Mais l'essentiel des problèmes, c’est-à-dire tout ce qui relève de la politique européenne, décidée à Bruxelles, appliquée servilement par nos gouvernements, ne sont jamais abordés, jamais traités, et pour cause. Parce que François Hollande comme les autres n'a plus les manettes».
Pour M. Philippot, «tous ceux qui viennent ici faire de beaux discours», mettent «au-dessus des agriculteurs», «au-dessus des vaches qu'ils peuvent voir» au Salon de l’Agriculture, «la vache sacrée et la vache sacrée c'est Bruxelles». «C'est une idéologie et cette vache sacrée elle compte plus que nos agriculteurs», a poursuivi M. Philippot sur fond de «cocoricos» des gallinacés du Salon.
«Il faut comprendre d'où vient cette colère» des agriculteurs, a également estimé M. Philippot. «Ca ne justifie pas la violence, mais on peut la comprendre».
Le 29 février, la visite du Premier ministre français Manuel Valls au Salon de l’agriculture s’est déroulée dans une atmosphère tendue et a été marquée par des incidents. Quelques huées et quolibets ont salué ses déambulations dans la partie réservée aux éleveurs de vaches laitières, les plus remuants, qui avaient déjà sifflé et insulté le président François Hollande lors de sa visite le 27 février.
«Vous êtes les pantins de l'Europe», ou encore «Vas te cacher. T'as rien compris petit zizi, tu ne vas pas changer l'Europe», ont notamment lancé certains éleveurs à l'attention du Premier ministre.
Samedi 27 février
Au terme d'une visite plus que mouvementée, François Hollande quitte le Salon.
Même le géant américain du fast food McDonalds est de la partie.
Le préfet de police de Paris, Michel Cadot, a confirmé que les manifestants de la FNSEA qui ont détruit le stand du ministère de l’agriculture ne seraient pas poursuivis. «Deux personnes ont été conduites dans un car pour un contrôle d'identité. Elles sont en cours de remise en liberté. Dans la mesure où les incidents ont été assez limités puisqu' il s'agissait de dégâts matériels légers et qu'il y avait un engagement de mettre un terme à cette action il n'y aura pas de poursuites», a-t-il expliqué.
La présidente du Conseil régional d'Ile-de-France, Valérie Pécresse, s'est exprimée en direct depuis le Salon de l'Agriculture. Au cours de son intervention, filmée par notre correspondant sur place, elle a annoncé qu'elle envisageait de mettre en œuvre une «conférence régionale agricole», c’est-à-dire un lieu où l’on pourrait «faire le point» sur le secteur de l’agriculture, mais aussi de l’entreprise.
Elle a également pointé du doigt la réforme de la Politique Agricole Commune (PAC), qui «va pénaliser les uns sans profiter aux autres», selon elle.
Cinq personnes ont été interpellées après l'opération coup de poing qui a consisté à démonter le stand du ministère de l'Agriculture. Xavier Beulin a toutefois affirmé qu'elles seraient toutes relâchées.
Un des activistes aurait été blessé durant l'intervention de la police.
Les manifestants rassemblés près du stand du ministère de l'Agriculture, qu'ils sifflaient copieusement, viennent de terminer leur action. Au vu de la tension latente, d'autres activistes pourraient bien agir plus tard dans la journée.
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Des manifestants ont complètement démonté le stand du ministère de l'Agriculture, selon une journaliste de l'AFP. L'incident a provoqué l'intervention des CRS qui ont maîtrisé les manifestants. Le président n'était pas à cet endroit au moment des heurts.
Un agriculteur aurait tenté de jeter une bouse de vache à la face de François Hollande, rapporte la chaîne France Info.
Le président français a affirmé qu’il comptait bien faire pression «ici en France sur la grande distribution», accusée par les agriculteurs de contribuer à faire chuter les prix payés aux éleveurs. Il a ajouté que la loi de modernisation de l’économie, passée sous le gouvernement Sarkozy en 2008 devait «être revue».
Après avoir été sifflé et insulté, le président a affirmé à l’AFP : «Les cris de détresse, je les entends (...) La colère, je préfère qu'elle s'exprime à l'occasion de ce salon qu'à l'extérieur».
«Si je suis là aujourd'hui c'est pour montrer qu’il y a une solidarité nationale» et qu’«on va tout faire» pour aider l'agriculture, a assuré François Hollande, ajoutant qu’«en défendant l'agriculture je défends toute la Nation».
Cela n’a pas semblé convaincre le président de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), Xavier Beulin, qui lui a rétorqué : «Vous arrivez dans un contexte difficile. Un contexte de crise profonde. Elle dure.» Il a ensuite ajouté qu’«il y a beaucoup de désespérance, beaucoup de colère» parmi les agriculteurs, comme François Hollande a pu le constater.
François Hollande est arrivé à l’aube ce matin du 27 février, vers 6 heures 45. Si son arrivée s’est déroulée dans le calme, les premiers agriculteurs en colère n’ont pas tardé à se faire entendre et ont copieusement hué et sifflé le président de la République environ une heure plus tard. Les insultes ont également fusé envers le président.
Fumier ! On n'est pas des migrants ! Bon à rien !
C'est ce qu'on a pu entendre alors que François Hollande progressait à travers une foule de cultivateurs particulièrement hostiles.
Vêtus de t-shirts noirs marqués de l'inscription «Je suis éleveur je meurs», certains ont scandé : «Démission !». Sous les sifflets, le chef de l’Etat a assuré à un agriculteur que «la colère, je l'entends, je la comprends», ce qui n’a pas calmé les mécontents.
En marge de cette ouverture du Salon de l’Agriculture, la conjoncture est très peu favorable au gouvernement. Ainsi, selon un sondage de l’institut Odoxa publié samedi par le journal Le Parisien, 53% des Français trouveraient que Stéphane Le Foll est un mauvais ministre de l’Agriculture.
Les citoyens seraient également largement favorables, à hauteur de 81%, aux nombreuses manifestations d’agriculteurs qui secouent le pays afin de protester contre la chute des prix de vente de denrées telles que la viande ou les produits laitiers. Différentes actions de protestation ont en effet été menées ces derniers jours à Paris, mais également ailleurs en France, comme au Mans ou à Bordeaux.