A un peu plus d'un an de la présidentielle, le monde politique est en ébullition en France. Si François Hollande atteint des records historiques d'impopularité dans les sondages, son parti à la rose semble bel et bien déterminé à mener le combat avec acharnement pour se retrouver au second tour et l'emporter.
Et dernièrement, le contexte politique semble jouer en sa faveur : bataille de pouvoir chez Les Républicains, démêlés judiciaires pour Nicolas Sarkozy, perquisitions à-tout-va au Front national sur des suspicions de fraudes ... l'opposition en prend pour son grade. Simple coïncidence ou démarche politique délibérée ?
A gauche, certains, comme Jean-Luc Mélenchon, n'hésitent pas à déclarer y voir la preuve que le camp dit «conservateur» serait corrompu, voire malhonnête.
Mais à droite, nombreux sont ceux qui y voient un jeu politique mené par le Parti Socialiste. Certains d'entre eux vont même jusqu'à avancer l'idée saugrenue d'un complot politique mené par le PS pour déstabiliser ses adversaires.
A l'instar de Gilbert Collard, Secrétaire général du Rassemblement bleu Marine et proche du Front national qui s'est indigné des perquisitions effectuées au domicile de Jean-Marie Le Pen à Saint-Cloud ou qui encore sous-entend avec un brin d'ironie et tout en tâclant Nicolas Sarkozy, que la mise en examen de ce dernier joue en la faveur de François Hollande.
Chez les Républicains, un certain complotisme semble en effet planer à l'évocation des déboires que subit l'opposition. N'y aurait-il pas finalement un lien entre ces nombreuses démêlées judiciaires chez les Républicains et au sein du Front national ? Certains semblent le sous-entendre, comme par exemple Lionnel Lucas, député LR des Alpes-Maritimes.
Mais pour Jean Petaux, politologue à SciencesPo Bordeaux, que RT a interrogé sur la mise en examen de Nicolas Sarkozy et sur les récentes perquisitions faites au Front national, tout n'est pas si simple.
L’époque d’une justice aux ordres (...) est révolue
Pour lui, l’électorat du FN est déjà «très marqué par une posture antisystème» et «tout ceux qui ne sont pas pour elle [Marine Le Pen], sont forcément contre elle, donc capables tout».
Le politologue met donc ainsi en avant une certaine «posture victimaire» dans laquelle se placerait le parti de Marine Le Pen à chaque déboire : «C’est un électorat qui a la foi des premiers chrétiens, tout ce qui arrivera à Marine Le Pen d’ici à 2017 ne pourra être qu’un complot contre elle», explique Jean Petaux.
Plus tôt ce mercredi, évoquant l'affaire des parlementaires, le Front national avait déjà dénoncé une «opération politique» initiée par François Hollande et Manuel Valls. Dans un communiqué, le parti a évoqué «une opération politique directement pilotée par François Hollande et Manuel Valls, dans le but d'entraver, de surveiller et d'intimider l'opposition patriote».
Mais pour Jean Petaux, François Hollande «n’est pas associé aux poursuites qui frappent ses concurrents. La justice a réellement montré sa capacité d’indépendance». Pour le politologue, «l’époque d’une justice aux ordres qui instruisait à charge les dossiers qui concernaient les personnalités de l’opposition et à décharge les personnalités de la majorité est révolue».
Cette tendance à se placer en victime, Jean Petaux affirme la retrouver également chez les adorateurs de l'ancien président de la République : «Les amis de Nicolas Sarkozy se demandent "faut-il que Nicolas Sarkozy soit si dangereux pour accumuler un tel niveau de haine ou de persécution ?". Mais c’est une falsification de la réalité, ce n’est quand même pas François Hollande qui a dépassé les frais de campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy !», explique-t-il.
Selon Jean Petaux, «les juges ont montré à plusieurs reprises leur indépendance d’esprit et leur professionnalisme» en ce qui concerne la mise en examen de Nicolas Sarkozy.
Marine Le Pen au second tour des présidentielles, une aubaine pour François Hollande ?
Pour le journaliste politique John Laughland, interrogé par RT, «le harcèlement judiciaire que subit Nicolas Sarkozy est logique». En effet, il est selon lui «possible que le PS mène des manœuvres politiques visant à écarter le plus possible l'ex-président d'une nouvelle candidature, puisqu'en cas d'un passage du Front national de Marine Le Pen au second tour de la présidentielle, le PS serait quasiment sûr de l'emporter».
Néanmoins, «l'enquête judiciaire [contre Nicolas Sarkozy] étant en cours depuis longtemps, savoir si on peut réellement parler de justice politique reste difficile à dire car entre soupçonner et avoir des preuves il y a un fossé», a affirmé John Laughland.
Par ailleurs, la mise en examen de Nicolas Sarkozy pose véritablement la question sur sa potentielle candidature en 2017. Plus tôt ce mercredi, son avocat de toujours Thierry Herzog, a déclaré sur Europe 1 qu'«avoir été condamné n'empêche pas d'être candidat à la primaire».
A ce propos, Jean Petaux rejoint le point de vue de Thierry Herzog, tout en rappelant que le potentiel futur candidat devra faire avec ses démêlés avec la justice:
«On peut imaginer, en droit pur, que Nicolas Sarkozy est tout à fait légitime à maintenir sa candidature aux primaires. Après est-il capable d’assumer politiquement cette situation ?», s'interroge-t-il.
Pour John Laughland, une mise en examen inclu que «l'enquête va se poursuivre» et ainsi«ternir son nom car il pourrait être reconnu coupable d’une fraude, ce qui mettrait finalement «une croix sur ses ambitions présidentielles».
Sur la question d'un complot du PS, Jean Petaux préfère rester prudent, assurant qu'il y a peu de chances que le président de la République se voit ouvertement critiqué pour mener des coups-bas politiques:
«François Hollande est à l’abri d’un contre choc qui le verrait être accusé dans toute cette affaire. Il n’est pas associé aux poursuites qui frappent ses concurrents. La justice a réellement montré sa capacité d’indépendance».