France

L’industrie laitière française en crise : marges érodées et risque de «casse» imminent

Un rapport de la Banque de France, commandé par la FNIL, alerte sur l’érosion des marges des industriels laitiers privés, tombées à 1,1% en 2024. Entre pression de la grande distribution et coûts en hausse, le secteur craint une «casse» à la moindre crise.

Une étude inédite de la Banque de France, analyse 149 entreprises du secteur industriel laitier privé et met en lumière un décrochage des marges nettes depuis 2020. François-Xavier Huard, directeur général de la Fédération Nationale de l'Industrie Laitière (FNIL), dénonce : « On est à la limite de la ligne de flottaison ».


Le secteur va donc devoir réagir pour éviter une crise majeure. Il transforme 45 % du lait national et a généré 18 Md€ de chiffre d’affaire (CA) en 2024, employant 36 000 salariés, majoritairement dans le cadre de PME ancrées territorialement. Mais 80 % de ces entreprises sont des PME vulnérables, exportant à 22 % leur production. Un quart des adhérents de la FNIL tirent plus de 10 % de leur CA de l’international.

Entre guerre des prix et tensions internationales

En amont, les coûts explosent : le prix du lait spot (marché de gré à gré) a grimpé de 340 €/1 000 L en 2020 à 467 € en juin 2025, selon FranceAgriMer.

En aval, la grande distribution relance la guerre des prix : briques de lait à moins d’1 €, emmental bradé. Les négociations commerciales, ouvertes cet automne, s’annoncent tendues, malgré la loi Egalim censée protéger les hausses de coûts. Pire, les alliances européennes comme Concordis (Carrefour et Système U avec des Allemands) contournent la loi via des achats transfrontaliers : « 50 % de la collecte laitière négociée hors France en 2026 », alerte la FNIL, qualifiant cela d’« évasion législative ». Géopolitiquement, les droits de douane américains et les enquêtes chinoises menacent les exportations, vitales pour 40 % des volumes. La Banque de France note que 64 % de la valeur ajoutée va aux salaires (contre 59 % dans l’agro), et seulement 14 % aux actionnaires (contre 18 % dans l’agro), tordant le cou aux accusations de surprofits.

 

Cette fragilité menace toute la filière, des éleveurs aux consommateurs. Sans arbitrage rapide de l’État : allègement fiscal, renforcement d’Egalim, le risque de fermetures d’usines et de pertes d’emplois est réel. L’industrie laitière, pilier agroalimentaire, appelle à un sursaut collectif pour éviter l’irréparable.