Dans une lettre adressée le 6 août à François Bayrou, révélée par Le Figaro, Emmanuel Macron opère un virage significatif dans la politique française envers l’Algérie. Longtemps attaché à une diplomatie de dialogue avec Alger, le président appelle désormais à « agir avec plus de fermeté et de détermination ».
Ce changement intervient dans un contexte de relations bilatérales tendues, exacerbées par la reconnaissance française de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, un point de friction majeur pour l’Algérie.
Suspension de l’accord de 2013
Emmanuel Macron justifie ce durcissement par le « choix délibéré » des autorités algériennes de ne pas répondre aux appels répétés de la France à une coopération mutuelle. Parmi les griefs, il cite l’emprisonnement de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, condamné à cinq ans de prison, et du journaliste Christophe Gleizes, détenu depuis mai 2024. S’ajoutent à cela le refus d’Alger de reprendre ses ressortissants sous obligation de quitter le territoire français (OQTF) et la cessation de la coopération des 18 consulats algériens en France. Ces « difficultés croissantes » en matière migratoire et sécuritaire poussent Macron à revoir sa stratégie.
Concrètement, le président demande la suspension officielle de l’accord de 2013 sur les exemptions de visa pour les passeports diplomatiques et officiels, une mesure déjà effective depuis mai 2024 après des expulsions réciproques de diplomates. Il enjoint aussi le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, à appliquer la loi immigration de 2024 pour refuser les visas de court et long séjour aux officiels algériens. Cette fermeté s’étend à l’expulsion des individus en situation irrégulière, notamment après l’attentat de Mulhouse, attribué à un ressortissant algérien. Malgré ce ton offensif, Emmanuel Macron insiste sur son souhait de « relations efficaces et ambitieuses » avec l’Algérie, tout en listant les contentieux à résoudre : questions mémorielles, « dette hospitalière », et restitution des sites d’essais nucléaires. À Alger, ce revirement est perçu comme un « revers » pour le président Tebboune, qui pourrait y voir un alignement sur la ligne du ministre Bruno Retailleau qui prône la fermeté face à Alger.
Alors que l’Italie renforce ses liens avec Alger, Macron appelle ses partenaires européens à adopter une position commune pour éviter tout contournement. Cette stratégie de pression, cependant, risque de compliquer une relation déjà au bord de la rupture et pourrait aussi tendre les relations avec Rome.