France

Sites pornographiques : le Conseil d’État rétablit la vérification d’âge, des plateformes bloquent la France

Le Conseil d’État a rétabli l’obligation pour les sites pornographiques européens de vérifier l’âge des utilisateurs en France. En réaction, des plateformes comme Pornhub et YouPorn bloquent à nouveau l’accès, dénonçant un «dysfonctionnement législatif».

Le 15 juillet, le Conseil d’État a rétabli l’obligation pour les sites pornographiques basés dans l’Union européenne (UE) mais hors de France de vérifier l’âge de leurs utilisateurs, invalidant une suspension prononcée le 16 juin par le tribunal administratif de Paris.

Cet arrêté interministériel de février 2025, conforme à la loi de 2024, impose aux plateformes comme Pornhub, YouPorn et RedTube, éditées par Aylo à Chypre, de mettre en place des systèmes de contrôle d’âge, sous peine de sanctions de l’Arcom, pouvant aller jusqu’au blocage.

Ces sites doivent proposer des méthodes respectant le « double anonymat », permettant de prouver la majorité sans révéler l’identité, contrairement à la simple déclaration sur l’honneur utilisée auparavant.

 

Les sites, contraints, ferment temporairement

 

Le Conseil d’État a jugé que la condition d’urgence, requise pour un référé en suspension, n’était pas remplie, estimant que la société Hammy Limited (opérant Xhamster) n’a pas démontré d’« atteinte grave et immédiate » à sa situation économique. Il a également précisé que l’arrêté n’interdit pas la diffusion de contenus pornographiques aux majeurs, mais vise à protéger les mineurs, un impératif d’ordre public.

La ministre du Numérique, Clara Chappaz, s’est félicitée sur X : « YouPorn et Pornhub face au mur. Les manœuvres juridiques pour ne pas protéger les enfants ne fonctionnent pas. »

Au mois de juin, déjà, l’Arcom avait menacé de bloquer cinq sites porno pour non-vérification d’âge. La ministre a vu son action saluée par les associations de lutte contre la pornographie, à l’image de Stop au Porno.

En réaction, Aylo a de nouveau bloqué l’accès à ses plateformes en France, affichant un message critique : « La liberté a un bouton off, pour l’instant », dénonçant un « dysfonctionnement législatif ». Ce blocage fait suite à une première interruption le 4 juin, avant que les sites ne redeviennent accessibles fin juin après la suspension initiale de l’arrêté. L’industrie pornographique, notamment Aylo, conteste ces mesures, arguant qu’elles menacent la vie privée des utilisateurs et leur modèle économique basé sur un accès gratuit et massif, financé par la publicité.

Vérifier l’âge : à qui revient la responsabilité ?

En pleine lutte contre l’exposition des plus jeunes aux contenus pornographiques, certains acteurs estiment que la vérification d’âge devrait incomber aux fabricants de smartphones ou d’ordinateurs.

Ce bras de fer, qui dure depuis des années, illustre la complexité de concilier protection des mineurs – 2,3 millions fréquentent ces sites en France, selon l’Arcom – et respect de la vie privée.

Cinq pays européens, dont la France, testeront bientôt une application commune pour vérifier l’âge en ligne, comme l’a annoncé la Commission européenne. En attendant, le contentieux se poursuit, avec une décision sur le fond encore attendue.