France

Les députés macronistes se retournent contre la loi de «simplification» du gouvernement

Pour la première fois, les députés macronistes voteront contre le projet de loi de «simplification» porté par l’exécutif, mardi 17 juin. Ils dénoncent un texte dénaturé, notamment par la suppression des zones à faibles émissions (ZFE) et l’affaiblissement du «zéro artificialisation nette» (ZAN).

L’unité de la majorité présidentielle vole en éclats. Dimanche 15 juin, les députés du groupe Ensemble pour la République (EPR), le groupe macroniste au Palais Bourbon, mené par l'ancien Premier ministre Gabriel Attal, ont décidé de voter contre le projet de loi de « simplification de la vie économique » lors du vote solennel prévu mardi à l’Assemblée nationale. Ils se sont exprimés dans une tribune dans laquelle ils affirment refuser de « reculer » face à « l’urgence écologique ».

Ce texte, initialement conçu par Bruno Le Maire et repris par les gouvernements successifs de Michel Barnier et François Bayrou, visait à alléger les démarches administratives pour stimuler l’activité économique. Mais son parcours chaotique et ses amendements controversés ont provoqué une fronde inédite au sein du camp présidentiel.

Une fracture dans le « socle commun »

Adopté au Sénat, le projet, qualifié de « fourre-tout » par ses détracteurs, se donne notamment pour objectif de supprimer une vingtaine d’instances administratives. Cependant, c’est sur le plan écologique qu’il suscite la discorde. Les Républicains (LR) et le Rassemblement national (RN), avec le soutien de certaines voix de La France insoumise (LFI) et du « bloc central », ont obtenu la suppression des zones à faibles émissions (ZFE), jugées pénalisantes pour les classes populaires. Ce dispositif, destiné à réduire la pollution de l’air, ne serait plus obligatoire, même dans des métropoles comme Paris ou Lyon. « Supprimer les ZFE, c’est hors de question ! », a martelé Roland Lescure, député Renaissance, sur France 3 alors que la ministre de l’Écologie Agnès Pannier-Runacher avait affirmé à ce sujet : « J’ai honte de ce qui s’est passé à l’Assemblée ».

Autre point de rupture : l’affaiblissement du « zéro artificialisation nette » (ZAN), mesure emblématique du premier quinquennat Macron pour limiter la bétonisation des sols. « Vidé de sa substance », selon Pierre Meurin (RN), ce dispositif a été remanié pour faciliter les projets industriels, au grand dam des élus macronistes. Ajouté à cela, un article controversé permet de différer les compensations environnementales pour les projets d’aménagement, menaçant la biodiversité selon Manon Meunier (LFI).

Emmanuel Macron lui-même a exprimé son irritation face à ces « régressions écologiques » lors d’un déplacement à Douai. « On ne peut pas détricoter ça », a-t-il insisté. Encouragés par le président, les 94 députés EPR estiment que le texte, modifié par 2 700 amendements, a perdu son ambition initiale. Avec l’opposition de la gauche et le poids des macronistes, le projet risque d’être rejeté mardi. Toutefois, une commission mixte paritaire pourrait être convoquée en septembre pour tenter de trouver un compromis. Certains anticipent déjà une censure partielle par le Conseil constitutionnel, notamment sur la suppression des ZFE, possible « cavalier législatif ».

Cette fronde marque un tournant : jamais les macronistes ne s’étaient opposés aussi frontalement à l’exécutif, révélant les tensions internes et les défis d’une majorité fragilisée face aux compromis parlementaires et alors que le président Macron s’est vu critiquer par des ONG pour son sommet de la mer qui, selon elles, manquait d’ambition.