«Soit il y a une mobilisation générale, soit il y a la mexicanisation du pays». Le 1er novembre, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau mettait en garde sur la situation sécuritaire du pays faisant valoir la «mexicanisaiton» de la France. Il évoquait alors l’actualité sécuritaire du pays alors qu’un enfant de cinq ans avait été touché par un tir d’arme à feu et qu’une fusillade sur fonds de trafic a eu cours à Poitiers, dans l’Ouest de la France. Pour le ministre, le pays est à un «point de bascule».
Le premier flic de France a par ailleurs évoqué «une toile de la corruption qui s’étend dans divers administrations» ainsi que «des narco-enclaves» qui se créent en France. Ce constat alarmant a été différemment perçu au sein de la classe politique française.
Le ministre conforté dans son analyse
Les journalistes et les personnalités politiques qui ont réagi aux propos du ministre se sont montrés plutôt favorable à son analyse. Ainsi, Didier Migaud, ministre de la Justice dont les relations avec Bruno Retailleau ont pu être tendues, a-t-il même affirmé à propos de la corruption liée à la drogue en France: «c’est possible, bien évidemment, et nous devons mettre en place tous les dispositifs qui permettent de prévenir ce type de situation». Le journaliste Laurent Joffrin, ancien rédacteur en chef de Libération, a soutenu l’usage du terme «mexicanisation». Et d’ajouter «le discours lénifiant souvent tenu à gauche sur l’usage et la vente de stupéfiants n’est plus de saison: la France est désormais confrontée à un risque majeur de "mexicanisation" du trafic sur son territoire».
Le député du parti présidentiel David Amiel, qui s’était montré très critique sur Bruno Retailleau, a cette fois-ci soutenu le ministre en affirmant sur France Info: « C’est des paroles fortes qui ont le mérite de souligner une réalité […], moi je parle volontiers de risque de "narcoterrorisme" en France».
À droite, le Rédacteur en chef de l’hebdomadaire Valeurs Actuelles Amaury Brelet va lui plus loin en affirmant qu’«en plus d'une mexicanisation liée au narcotrafic, la France subit une libanisation rampante. Des affrontements entre bandes, de plus en plus jeunes et violentes, sur des lignes de fracture souvent culturelles, communautaires voire ethniques. Une guerre civile larvée».
Un phénomène peu remis en cause
À gauche, quelques voix se sont élevées contre l’usage de l’expression «mexicanisation». L’eurodéputé socialiste Chloé Ridel a ainsi écarté ce terme tout en posant le même constat : «sans parler de "mexicanisation" de la France, le trafic de drogue s’étend dans notre pays et c’est un problème global: sécuritaire, sanitaire mais aussi social. Ce sont les quartiers populaires et ses habitants qui en sont les premières victimes». Le maire écologiste de Poitiers, ville où s’est déroulée une fusillade entre bandes de narcotrafiquants, Léonore Moncond'huy, s’est dite «choquée» par l’utilisation de l’expression «mexicanisation».
Interrogé par le journal 20 Minutes, le journaliste Frédéric Saliba, auteur du livre Cartels, Voyage au pays des Narcos, estime, lui, que la France «n’est pas un narco État […] mais si on ne fait rien, on pourrait l’être dans quelques années».