Une magistrate du tribunal de Paris a ouvert une enquête pour «tortures» et «détention arbitraire» sur onze djihadistes français condamnés à la prison à vie en Irak, a rapporté le 20 octobre l’agence de presse d’État française AFP citant le Parquet national antiterroriste (Pnat).
Après la chute de l'organisation État islamique, onze djihadistes français avaient été condamnés à mort par pendaison en juin 2019 en Irak. Le 30 mai 2023, la justice irakienne a commué cette peine en un emprisonnement à vie, suivant la demande du ministère de la Justice français.
Les onze sont en effet visés par des mandats d'arrêt en France pour terrorisme et certains ont été impliqués dans des projets d'attentats en France avant leur départ puis pendant leur séjour en zone irako-syrienne, selon le Pnat.
Les onze djihadistes seraient privés de soins médicaux adéquats et soumis à un isolement quasi-total, ont dénoncé leurs avocats français qui ont transmis à la justice française des rapports qualifiés «d’alarmants» après leur visite à la prison d'Al-Rusafa à l'automne 2023 et en février 2024.
Les avocats des djihadistes ont décrit des «conditions indignes», rapportant des promenades qui ne duraient que 10 à 30 minutes, dans une cour minuscule et des «punitions» infligées par le chef de cellule qui pouvait, selon leurs dires, les «insulter, humilier, et violenter en toute impunité».
De manière générale, les avocats français ont fait état de prisonniers «entassés à plus de 120» dans des «cachots insalubres», «exposés à une chaleur étouffante», «avec seulement une douche et deux toilettes».
Appels à leur rapatriement
«On ne peut pas admettre que des Français dépérissent dans des geôles, quelle que soit la gravité des faits qu'on leur reproche», a soutenu l’un des avocats, cité par AFP, demandant «un jugement en France».
Depuis décembre 2023, une juge d'instruction à Paris enquête pour tortures sur au moins deux d'entre eux. Des investigations qui donnent espoir aux autres djihadistes, qui ont aussi porté plainte et qui espèrent purger leur peine en France.
Selon un des avocats des djihadistes, la justice française procède à «des interrogatoires intenables pour les droits de la défense, qui fragilisent les procédures» au lieu d'attendre l'exécution du mandat d'arrêt et le transfèrement en France pour les interroger.
«Le transfèrement est la règle et le problème est justement que les autorités françaises y dérogent, sans justification», a relevé un autre avocat.
Deux représentants d'associations de victimes d'attentats ont aussi indiqué vouloir le rapatriement des djihadistes, pour une «plus grande transparence» des enquêtes.
En Irak, un responsable au ministère de la Justice cité par l’AFP a affirmé que son pays «n'avait reçu aucune demande officielle des autorités françaises».
L’agence de presse française affirme que ni le ministère des Affaires étrangères ni le ministère de la Justice, «interrogés plusieurs fois», n'ont répondu à ses questions concernant leur rapatriement.