«Gabriel Attal doit s'en aller. Le président de la République aurait dû accepter sa démission.» Ce 9 juillet sur le plateau de BFMTV, l’ancienne présidente du groupe des Insoumis à l’Assemblée nationale Mathilde Panot a fustigé le maintien du Premier ministre à Matignon.
Fraîchement réélue députée, elle s’est dite «inquiète» d’une hypothèse selon laquelle le président ne choisirait pas une personnalité de gauche pour succéder à l’actuel chef du gouvernement à Matignon.
Emmanuel Macron a en effet refusé la démission de ce dernier le 8 juillet, lui demandant de rester en poste «pour le moment» afin de garantir «la stabilité du pays». Les Insoumis réclament la nomination d’un ministre du Nouveau Front populaire (NFP) après leur victoire du 7 juillet aux élections législatives lors de laquelle la coalition des gauches a obtenu un total de 178 députés, une majorité relative avec seulement 28 élus de plus que la majorité sortante qui se présentait sous la bannière Ensemble.
Les candidats et les profils avancés par les différents partis de gauche se multiplient alors que le président semble envisager différents scénarios.
Charge des Insoumis et critique à gauche
Le coordinateur national de La France insoumise (LFI) Manuel Bompard déclarait quant à lui en milieu d’après-midi le 8 juillet : «Il n'est pas question que le maintien de Gabriel Attal à Matignon vienne effacer le vote des Français. Aujourd'hui, nous nous préparons à gouverner et à appliquer le programme qui est le nôtre.»
Le secrétaire général du Parti socialiste (PS) Olivier Faure a lui estimé sur le plateau de TF1 que le président devait «reconnaître sa défaite».
Aux critiques politiques, s’est ajoutée celle d’un constitutionnaliste, Jean-Philippe Derosier. Proche du Parti socialiste, ce dernier a qualifié le 8 juillet sur RTL la décision du chef de l’État de «mal inspirée» en ce qu’«elle ne tient précisément pas compte du résultat des élections législatives». Sur le plateau de La Chaîne Parlementaire (LCP), ce spécialiste du droit public a par ailleurs évoqué «une forme d’irresponsabilité» d’Emmanuel Macron.
Les noms et les profils qui circulent
Pour Mathilde Panot, la nomination de Jean-Luc Mélenchon est «une des possibilités» pour succéder à Gabriel Attal. Une hypothèse cependant assez peu probable tant l’ancien candidat à la présidentielle est critiqué à gauche, notamment dans les rangs socialistes où François Hollande avait estimé lors de la campagne qu’il fallait «qu’il se taise» s’il voulait «rendre service au Nouveau Front populaire». Le président de Place publique et chef de file des socialistes aux européennes Raphaël Glucksmann a lui qualifié Jean-Luc Mélenchon de «problème immense» pour la gauche à la veille du second tour des élections législatives.
Pour le coordinateur de LFI Manuel Bompard, le Premier ministre doit être issu de son parti : «La France insoumise est le premier groupe du NFP. L’usage républicain veut que le Premier ministre vienne du principal groupe de la coalition.» L’hypothèse Mélenchon est également balayée par Clémentine Autain, élue LFI qui a annoncé ne pas siéger avec ses anciens camarades, sur fond de désaccord avec la direction du parti. Interrogée sur LCP, elle estime que «Jean-Luc Mélenchon n’est pas qualifié pour être Premier ministre», balayant également l’hypothèse François Hollande, mais affirme en revanche : «Mon nom circule et je suis prête à prendre cette responsabilité.» Son opposition avec ses anciens camarades, arrivés en tête de la coalition des gauches aux législatives, pourrait néanmoins affaiblir sa candidature.
Le rejet de Jean-Luc Mélenchon semble être assez partagé à gauche. Le secrétaire général du Parti communiste (PCF) Fabien Roussel a affirmé ce 9 juillet que l’hypothèse Jean-Luc Mélenchon n'était «même pas abordée». «Pour la majorité des représentants des forces politiques dans ce Nouveau Front populaire, il ne sera pas et ne peut pas être Premier ministre», a-t-il ajouté. L’ancien député communiste éliminé au premier tour de l’élection présidentielle plaide pour «un profil rassembleur pour un Parlement apaisé, avec une capacité de dialogue et d'écoute importante».
Des propos qui font écho à ceux de la patronne des écologistes Marine Tondelier, laquelle réclame une «figure qui doit apaiser et réparer le pays» mais également une personne devant «faire consensus».
Le nom de l’Insoumise Clémence Guetté revient par ailleurs avec insistance. Moins adepte de la polémique que ses camarades, elle a également été citée par Jean-Luc Mélenchon et d’autres députés, à l’image de François Piquemal, comme potentielle candidate.
Une porte entrouverte vers une alliance avec la majorité sortante
Maire de Nantes, négociatrice du PS au Nouveau Front populaire, Johanna Rolland a de son côté ouvert la porte aux «macronistes de gauche» en estimant ce 9 juillet sur Télé Matin qu’ils pouvaient se joindre à la coalition «sur les bases du Nouveau Front populaire». Avant d'ajouter : «Nous sommes clairs mais pas sectaires.»L’édile nantaise devrait néanmoins faire face à des réticences, à l’image de Sandrine Rousseau, députée écologiste, qui affirmait la veille sur France Info : «Il n'est pas question de trahir le mandat donné par les électeurs.»
Du côté de l’ancienne majorité présidentielle, certains prônent une union avec les forces de centre gauche, à l’image d’Édouard Philippe qui a appelé à une grande coalition dès le 7 juillet, mais en excluant La France insoumise.
Reste que les espoirs du camp présidentiel ne semblent pas tous enterrés, selon certains. Cité par l’AFP, un député macroniste de Paris affirme que pour «trouver une coalition de majorité relative», et cela, «sans l'extrême droite ni la gauche radicale», le processus de nomination prendra «plusieurs semaines».