France

Nouveau Front populaire : une victoire sur fond de barrage républicain

En obtenant 183 élus, soit une cinquantaine de plus qu’en 2022, l’alliance des gauches dite Nouveau Front populaire est arrivée en tête des élections législatives le 7 juillet. Une victoire rendue possible par le «barrage républicain» érigé contre le Rassemblement national, qui a pourtant engrangé plus de 10 millions de voix.

«La défaite du président de la République et de sa coalition est clairement confirmée.» Le 7 juillet peu après 20h, le fondateur de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon savourait la victoire de l’union des gauches, le Nouveau Front populaire (NFP), et la défaite de la majorité sortante du président Emmanuel Macron. Le NFP totalise ainsi 183 députés, soit une augmentation d’une cinquantaine d’élus par rapport à la Nupes en 2022.

Le centre macroniste, présent sous l’étiquette Ensemble, est lui arrivé en deuxième position avec 150 élus, soit une hémorragie de 100 parlementaires par rapport à 2022. Le Rassemblement national complète le podium électoral avec 143 députés et une progression, comme l’union des gauches, de 55 élus.

La victoire surprise du NFP se fait au bénéfice de La France insoumise qui dispose désormais du plus grand nombre de députés à gauche avec un total qui avoisine les 80 élus. Un résultat dont l’ancien député Jean-Luc Mélenchon s’est félicité dans la foulée des premiers résultats, avant d’appeler Emmanuel Macron à «s'incliner» et à «admettre cette défaite». Pour lui, «aucun subterfuge, arrangement ou combinaison ne serait acceptable».

Et pourtant... C’est bien grâce à un arrangement que l’union des gauches est arrivée en tête, avec le barrage républicain.

Le barrage républicain fait gagner les gauches et sauve la majorité sortante

Les chiffres des élections législatives peuvent surprendre quiconque n’est pas au fait des subtilités d’un tel scrutin. En effet, le RN arrive en troisième position alors qu'il comptabilise le plus grand nombre de voix, avec plus de 10,1 millions d’électeurs au deuxième tour (contre 10,3 millions au premier). Le NFP, connaît de son côté un reflux, de 9 à 6,9 millions de voix entre le premier et le second tour et arrive néanmoins en tête. La majorité, elle, se maintient au-dessus des 6 millions de voix et obtient la deuxième place.

En réalité, ces chiffres s’expliquent par l'alliance de fait entre la gauche et le centre qui a pris la forme du désistement au mieux placé. Ainsi, les partis de gauche, par la voix de Jean-Luc Mélenchon, comme la majorité centriste sortante, par la voix de Gabriel Attal, s’étaient-ils engagés au soir du premier tour à se désister en faveur du mieux placé pour éviter la victoire d’un candidat RN au second tour.

Le 2 juillet, deux jours après le premier tour, plus de 200 désistements avait déjà été recensés. Ils étaient en tout près de 220 à avoir renoncé pour contrer le RN, soit dans plus d’un second tour sur trois pour un scrutin comptant 577 élections.

Une consigne de vote plus favorable au centre qu’à la gauche

Une étude Ipsos-Talan pour divers médias publics rapportée par France Info le 7 juillet au soir indique que «les électeurs du Nouveau Front populaire du premier tour se sont massivement portés sur les candidats Ensemble et Les Républicains en cas de duel contre le RN au second tour», mais qu’en revanche la réciproque s’est opérée «dans une moindre mesure», les électeurs de l'ancienne majorité présidentielle ayant eu des réticences à voter en faveur des candidats de La France insoumise.

En cas de duel RN contre LFI, seuls 47% des électeurs Ensemble ont voté pour le candidat de gauche, un chiffre qui monte à 54 % quand il s’agissait de candidats socialistes, communistes ou écologistes.

En revanche, lors des duels Ensemble/RN, 72% des électeurs NFP ont soutenu le candidat macroniste. La victoire de la NFP repose donc en partie sur le report de voix du centre tout comme le score correct d’Ensemble doit beaucoup au report de voix des gauche.

L'alliance incongrue entre le centre et la gauche va-t-elle se poursuivre ?

La perspective d’une alliance entre le centre et la gauche semble désormais ouverte, le NFP ne pouvant pas gouverner avec une majorité relative de moins de 200 députés.

Pour y parvenir, la première force de l’union des gauches, La France insoumise, pourrait être sacrifiée, la personnalité de Jean-Luc Mélenchon étant envisagée comme un repoussoir par certains de ses alliés, à l’image du chef de file de la liste socialiste aux européennes Raphaël Glucksmann, qui qualifiait sur RTL le 5 juillet, deux jours avant le vote, l’ancien candidat à la présidentielle de «problème immense».

Une partie de la coalition de gauche pourrait ainsi envisager une alliance avec le centre et le chef de gouvernement sortant Gabriel Attal. Une hypothèse qu’a balayé d’un revers de main Jean-Luc Mélenchon lors de sa prise de parole à l'issue du scrutin : «Nous refusons d'entrer dans des négociations avec son parti pour faire des combinaisons.»