France

Rassemblement national : une défaite en dépit d’un nombre record de députés élus

Avec 142 élus contre 88 lors de la précédente législature, le Rassemblement national obtient un nombre record d’élus. Le parti présidé par Jordan Bardella se trouve cependant très loin des 289 sièges nécessaires pour obtenir une majorité absolue et l'ambiance y est morose au lendemain des élections.

«Le Rassemblement national réalise la percée la plus importante de toute son histoire.» Le 7 juillet, lors de son allocution devant des militants réunis dans l’Est de Paris, le président du Rassemblement national (RN) Jordan Bardella s’est félicité de la progression de son parti, qui a gagné une cinquantaine de députés entre 2022 et 2024.

L’eurodéputé, qui visait la place de Premier ministre, se trouve cependant très loin de la majorité absolue, laquelle lui aurait permis de briguer la fonction de chef du gouvernement. Relégué du rang de gouvernant potentiel à celui d’opposant, le président du parti a assuré que le RN incarnait «plus que jamais la seule alternance, face au parti unique qui s’étend de Philippe Poutou à Édouard Philippe».

Première force d’opposition en cas d’alliance entre le centre macroniste et l’alliance des gauches du Nouveau Front populaire (NFP), le RN n’en demeure pas moins le premier parti du pays, à considérer le nombre de voix obtenues lors du second tour.

En tête en nombre de voix, loin en nombre d’élus

Le RN a connu un léger reflux en nombre de voix, avec un total de plus de 10,5 millions au soir du 30 juin pour environ 10,1 millions d’électeurs le 7 juillet. Un nombre de votes qui place ce parti loin devant le NFP, passé de près de 9 millions de voix à 7 millions.

En troisième position, la majorité sortante reste stable par rapport au premier tour, se plaçant un peu au-dessus de 6 millions de voix. Le NFP se place cependant en tête du scrutin, avec un total de 193 élus pour l'heure. Ensemble (le nouveau nom de l’ancienne majorité macroniste) est en deuxième position, avec 165 députés.

Les listes de l’union des gauches et celles du centre, respectivement derrière le RN en nombre de voix, le supplantent donc en nombre d’élus à la faveur des désistements opérés au nom du «barrage républicain», qui a consisté à laisser le mieux placé se maintenir pour battre le candidat RN.

Ces chiffres du nombre de votants font affirmer au député du Pas-de-Calais Bruno Bilde que le RN est «de loin le premier parti des Français».

Le parti doit «faire son examen de conscience»

Ce même élu, s’il se félicite du succès numérique du RN, n’a pas mâché ses mots auprès du journal Le Monde. Contacté le 8 juillet par le quotidien national, ce proche de Marine Le Pen a appelé son parti à «faire son examen de conscience». Élu au Palais Bourbon depuis 2017, il estime que le parti aurait «dû avoir plus de sièges». Et de mettre en cause «un problème dans nos fédérations départementales» , dénonçant des candidats aux «profils extrêmement clivants, parfois même inquiétants».

Des polémiques ont en effet émaillé la campagne avec des candidats aux positions ou aux propos jugés sulfureux par une partie de la presse. Par ailleurs, les candidats RN n’étaient pas visibles sur les affiches de campagne et certains n’étaient pas joignables par les journalistes ou ont tout bonnement refusé de débattre.

Derrière les critiques de Bruno Bilde se joue une lutte d’influence au sein du Rassemblement national. Le député est en effet en froid avec le directeur général du RN, Gilles Pennelle, soutien indéfectible de Jordan Bardella et responsable des investitures et à l’origine du «plan Matignon», qui visait à préparer les élections législatives.

Philippe Schleiter, un proche de Marion Maréchal ayant quitté le parti Reconquête avec celle-ci, a quant à lui regretté, dans un message divulgué sur les réseaux sociaux par les partisans d'Eric Zemmour, que le RN n'ait pas su jouer une coalition en raison d'une incapacité à faire exister d'autres étiquettes que la leur, et mis en avant «des arguments très faibles». «Il leur faudra urgemment changer de logiciel, a-t-il ensuite taclé, dénonçant ensuite des candidats peu «implantés», mais aussi «mal formés et mal sélectionnés».