Entretiens

Michel Meyer : les dirigeants européens sont «pétrifiés» par la crise politique allemande

Ancien correspondant en Allemagne, Michel Meyer passe en revue les différents scénarios possibles s'offrant à Angela Merkel, alors que les négociations pour la formation d'un gouvernement ont échoué. La chancelière est-elle dans une impasse ?

«Tous les chefs d'Etat des pays européens regardent cette situation allemande pétrifiés [...] Cela a pour conséquence la remise en cause de toute cette vision et de tout ce processus européen», constate Michel Meyer, écrivain, journaliste, longtemps correspondant de la télévision française en Allemagne et figure de la radio française. Et l'intéressé de rappeler que la crise allemande pourrait compromettre les grandes ambitions européennes, reposant sur le tandem franco-allemand, contenues dans le discours d'Emmanuel Macron à la Sorbonne du 26 septembre, soit deux jours après les législatives allemandes.

Ce 19 novembre 2017, les trois partis allemands susceptibles de former une coalition permettant à Angela Merkel de gouverner ont jeté l'éponge. Alors que la chancelière mettait en garde, début novembre, contre la tenue de nouvelles élections législatives, elle écarte désormais toute perspective de diriger un gouvernement de minorité. Convoquer les Allemands aux urnes une nouvelle fois lui paraît la moins mauvaise des issues à la crise politique que traverse le pays, mais aussi par ricochet les Etats membres de l'Union européenne.

Trois scénarios, mais pas de miracle

Aussi, pour Michel Meyer, après l'échec d'une entente entre l'Union des démocrates-chrétiens (CDU) d'Angela Merkel, du Parti libéral (FDP) et des Verts, trois scénarios sont désormais possibles, mais qui ressemblent forts à des impasses. 

Première hypothèse, le Parti social-démocrate allemand (SPD) pourrait venir à la rescousse d'Angela Merkel et lui permettre de construire une autre coalition de gouvernement. «Ils ne le veulent pas, ils souhaitent avoir la cure d'opposition qui leur permette de se régénérer», analyse Michel Meyer, rappelant que le SPD s'était fait «laminer» aux élections législatives allemandes de septembre 2017. «Deuxième formule, Angela Merkel accepte de se présenter devant le Bundestag [...] dans une situation de minorité», poursuit Michel Mayer. Or, Angela Merkel a fait savoir ce 20 novembre que, malgré ses réticences, elle préférait encore de nouvelles élections à un gouvernement de minorité.

Une alliance entre chiens et chats

Dernière solution, selon Michel Meyer, l'intervention du président allemand, Frank-Walter Steinmeier. Ce dernier est effectivement en mesure de jouer de son prestige constitutionnel pour faire en sorte d'organiser de nouvelles élections. Mais Frank-Walter Steinmeier a appelé ce même 20 novembre les partis politiques à regagner la table des négociations.

La situation paraît donc inextricable. D'autant qu'Angela Merkel est sortie passablement affaiblie des dernières législatives. «Il s'agit d'une chancelière qui a perdu de sa superbe et qui a perdu des voix», constate Michel Meyer, ajoutant : «[Elle] a cherché malgré tout à sauver la situation avec une alliance entre chiens et chats.»

Lire aussi : L'Allemagne en crise : vers de nouvelles élections et une probable démission d'Angela Merkel