Le géant russe Gazprom a annoncé le 15 juin une nouvelle baisse d’un tiers de ses livraisons de gaz via le gazoduc Nord Stream, affirmant avoir été forcé d'arrêter un équipement de l'allemand Siemens. Il avait invoqué la même raison la veille pour expliquer une première baisse de 40% de ses flux.
Dans un communiqué le groupe explique qu’il arrête le fonctionnement d'une autre turbine à gaz de Siemens à la station de compression Portovaïa, où se fait le remplissage de Nord Stream, et dont la production quotidienne doit passer ce 15 juin de 100 à 67 millions de mètres cubes par jour. La veille, il avait déjà annoncé une première baisse de 167 à 100 millions de mètres cubes.
Cela porte à près de 60% la baisse des approvisionnements quotidiens via le gazoduc sous-marin qui relie la Russie à l'Allemagne via la mer Baltique depuis 2012. Dans le même temps, les livraisons de Gazprom au groupe italien ENI ont diminué de 15% pour la journée du 15 juin.
Pour Berlin c’est une «décision politique» et un «prétexte», dans un contexte de vives tensions avec les pays occidentaux à cause du conflit en Ukraine. «Il s'agit clairement d'une stratégie visant à perturber et faire grimper les prix», a estimé le ministre allemand de l'Economie et du Climat Robert Habeck, cité par l’AFP, après la seconde réduction des livraisons de gaz par Gazprom.
La baisse des livraisons de Gazprom compensée par la hausse des cours
Les exportations de gaz russe vers l'Europe sont en baisse constante depuis le début des sanctions occidentales contre la Russie. Gazprom a précisé dans son communiqué que les exportations vers les pays ne faisant pas partie de la Confédération des Etats indépendants qui regroupent neuf des quinze anciennes républiques soviétiques, avaient baissé de 28,9% du 1er janvier au 15 juin par rapport à la même période l'an dernier.
Pourtant les revenus de la vente de gaz n'ont pas été affectés, du fait de l'envolée des prix des énergies fossiles, en partie provoquées par les sanctions occidentales contre la Russie. Le Kremlin souligne régulièrement que les décisions des dirigeants européens touchent avant tout leurs propres populations.
Ces dernières semaines, Gazprom a interrompu ses livraisons de gaz à plusieurs clients européens – Bulgarie, Pologne et Finlande notamment – qui ont refusé le schéma de paiement avec un compte en rouble.
En réplique aux sanctions imposées par l'Union européenne à la suite de l'opération militaire russe en Ukraine, le président russe Vladimir Poutine a, en effet, signé un décret imposant aux pays jugés «hostiles» le paiement depuis des comptes en roubles ouverts chez Gazprombank, sous peine d'être privés d'approvisionnement.
Berlin suit «les choses de très près»
Le gazoduc Nord Stream livre depuis 2012 du gaz russe à l'Allemagne via la mer Baltique, sur deux tronçons de 1 224 kilomètres chacun. Selon les données de la société d'exploitation du pipeline, 59,2 milliards de mètres cubes de gaz naturel ont été exportés de Russie vers l'Europe par Nord Stream en 2021. C’est une source d'approvisionnement importante pour l'Allemagne dont 35% des importations de gaz viennent de Russie.
Le gouvernement allemand, cité par l’AFP, a toutefois assuré le 14 juin que «la sécurité d'approvisionnement [était] garantie». Il a ajouté qu’il suivait «les choses de très près», a un moment où il est contraint de reconstituer ses stocks de gaz au prix fort avant l'hiver.