Economie

Fitch dégrade les géants chinois de l’immobilier : inquiétude pour l’économie mondiale

Les défauts de paiement des géants de l’immobilier chinois sèment le doute sur leurs capacités à honorer des centaines de milliards de dollars d'obligations. Quels risques font-ils peser sur la croissance mondiale ?

L'agence de notation Fitch a abaissé le 9 décembre la note des promoteurs immobiliers chinois China Evergrande Group et Kaisa Group, très lourdement endettés, à «défaut restreint», parce qu'ils avaient, selon l’agence, fait défaut sur des remboursements d’obligations offshore (auprès d’investisseurs étrangers en dollars).

Dans sa note sur Evergrande, Fitch explique que le développeur immobilier chinois n'a pas répondu à sa demande de confirmation de remboursements d'une valeur de 82,5 millions de dollars qui étaient dus en novembre, le délai de grâce de 30 jours se terminant cette semaine, et a donc supposé qu'ils n'avaient pas été payés.

La situation est sérieuse car le non-paiement des échéances ayant déclenché un «cas de défaut» sur les obligations d'Evergrande, ses autres obligations en dollars deviendront immédiatement exigibles et payables si les détenteurs d'au moins 25 % du montant total de ces titres de dette le réclament, selon les explications de Fitch. Ce qui pourrait en théorie provoquer des cascades de faillites en Chine et dans le monde.

En effet, Evergrande a pour le moment à travers plusieurs filiales fait défaut sur des emprunts totalisant 1,2 milliard de dollars (1,06 milliard d’euros), mais son ardoise totale  équivaut à 260 milliards d'euros (environ10% du PIB français).

La Banque centrale chinoise tente de rassurer

Le gouverneur de la Banque populaire de Chine (PBOC), Yi Gang, s’est efforcé de rassurer les investisseurs en déclarant le 9 décembre que les droits des actionnaires et des créanciers d'Evergrande seraient «pleinement respectés», mais  en fonction de leur ancienneté juridique. Il a aussi assuré que le risque financier provoqué par certaines sociétés de promotion immobilières chinoises à court terme ne porterait pas atteinte au marché des capitaux de Hong Kong.

Dans une note adressée à ses clients, Ashmore Group, société de gestion d'actifs cotée au Royaume-Uni, exposée à la fois aux obligations Evergrande et Kaisa explique : «Les banques et les détenteurs d'obligations tant locaux qu'étrangers accueilleront favorablement les restructurations de la dette des entreprises ayant des problèmes de liquidité, à condition qu'elles soient menées de manière juste, transparente et franche.»

Malgré tout, dans un pays ou près d’un quart de la croissance interne est créée par le secteur immobilier, la crise de la dette d’Evergrand et des autres promoteurs immobiliers chinois fait craindre des conséquences sur la santé de l’économie mondiale.

Une perte de PIB mondial de 0,7% à 1,6%

Au début du mois, l'OCDE a abaissé ses prévisions de progression du produit intérieur brut (PIB) pour la Chine – un des principaux moteurs de la croissance mondiale – en 2022, de 8,1% à 5,1%, dans le sillage du FMI en octobre. Début septembre l’organisation redoutait déjà que les risques persistants sur le marché immobilier chinois, aient des effets importants entre secteurs et au-delà des frontières.

De son côté, dans son rapport sur la stabilité financière publié en novembre, la Banque centrale américaine (Fed) s'est inquiétée de ce que les déboires d'Evergrande puissent représenter des risques pour l'économie mondiale, déjà soumise au spectre du ralentissement après une forte reprise cette année, sur fond de reprise épidémique et d'inflation élevée.

Cité par l’AFP, le cabinet Oxford Economiques modère les craintes d’une contagion mondiale des difficultés de la promotion immobilière chinoise, en raison du faible stock de logements invendus, de la possibilité d’intervention publique, du maintien de la croissance de l'urbanisation du pays et de la croissance significative de ses revenus.

Le cabinet a toutefois établi deux scénarios de crise : l'un où la croissance mondiale se verrait amputée de 0,7% à l'horizon de fin d'année prochaine si les déboires immobiliers chinois devaient ressembler à ceux de la période 2014-2015 dans le pays, et l'autre où le PIB mondial chuterait de 1,6 point fin 2022 si ce trou d'air ressemblait à la crise immobilière américaine ou espagnole des années 2000.