Economie

«Porte-parole du Medef» : trois ONG critiquent la France concernant sa transparence fiscale

CCFD Terre Solidaire, Oxfam et Transparency International affirment que le document de position française dans les négociations européennes sur les obligations de transparence des entreprises a été «rédigé en partie» par le mouvement patronal.

Le 23 avril, trois organisations non gouvernementales (ONG) ont accusé la France de se faire «le porte-parole du Medef» dans les négociations européennes sur les obligations de transparence des entreprises, alors que Bercy affirme défendre le compromis européen et œuvrer pour une adoption rapide du texte.

Le compromis trouvé par la présidence portugaise du Conseil européen défend le principe d'une comptabilité («reporting») pays par pays des entreprises, dans le but d'éviter l'optimisation fiscale au profit des pays où l'imposition des bénéfices est la plus avantageuse. Mais ce principe serait limité aux pays de l'Union européenne et à ceux inscrits sur la liste noire des paradis fiscaux, et ce afin de ne pas livrer trop d'informations sensibles aux concurrents sur les autres marchés qui ne sont pas soumis aux mêmes obligations de transparence. Le compromis européen prévoit également que les informations à caractère sensible ne soient pas divulguées pendant une durée de six ans.

CCFD Terre Solidaire, Oxfam France et Transparency International France affirment dans un communiqué que le document de position française a été «rédigé en partie par le Medef», le Mouvement des entreprises de France. Selon le média en ligne Contexte, «une experte en fiscalité apparaît d'ailleurs comme auteur dans les métadonnées du document».

«Un travail de sape que la France mène en coulisse»

«Nous regrettons la confusion qu'a pu engendrer l'utilisation d'un document créé au départ par le Medef», explique-t-on à Bercy, en précisant que ce document – profondément remanié par le ministère – listait des exemples d'informations sensibles que les entreprises pourraient être obligées de divulguer. Le ministère de l'Economie et des Finances affirme que le compromis européen permettra de faire avancer les obligations des entreprises en matière de transparence et que la France s'est battue pour que la directive relève de la «base juridique marché intérieur» qui permet une adoption à la majorité qualifiée, et non de la «base juridique fiscalité» qui exigerait un vote unanime des pays de l'UE. 

Mais les trois ONG considèrent que «ces positions participent d'un travail de sape que la France mène en coulisses pour amoindrir toute chance d'adoption d’un texte efficace, en endossant sans filtre les demandes du premier lobby d'entreprises françaises». Ces trois organisations soulignent que la version de la directive proposée par le Parlement européen étend, elle, l'obligation de comptabilité pays par pays à tous ceux où opèrent les multinationales. Le Parlement propose aussi que les informations sensibles ne restent sous le boisseau que pour une durée d'un an. Mais cette durée – contrairement à celle des six ans – serait renouvelable, précise-t-on à Bercy.