La scène est restée comme l'une des séquences fortes de l'entre-deux tours. Le 26 avril, en pleine campagne présidentielle, Emmanuel Macron et Marine Le Pen s'étaient livrés à une bataille de communication sur le site de Whirlpool, à Amiens.
Alors que le premier était en réunion à huis-clos avec l'intersyndicale des salariés de Whirlpool, la présidente du Front national s'était invitée devant le site de l'entreprise, pour s'offrir un bain de foule, saluant des salariés «qui résistent à cette mondialisation sauvage». «Je ne suis pas avec des représentants qui mangent des petits fours», avait alors déclaré Marine Le Pen, passant une quinzaine de minutes sur place et multipliant les selfies. Le futur président avait de son côté dénoncé une «utilisation politique», et ses équipes de campagne avaient diffusé sur les réseaux sociaux une vidéo dans laquelle on voit Emmanuel Macron s'engager à se rendre sur place dans l'après-midi, ce qu'il fit.
La quasi-totalité des salariés licenciés
La suite, tout le monde la connaît : en 2018, le projet de reprise – soutenu par Emmanuel Macron – de l'industriel picard Nicolas Decayeux, qui prévoyait de réembaucher 277 salariés, soit la quasi-totalité des effectifs, vire au fiasco. L'entreprise de Decayeux a été liquidée et ses divers projets n'ont jamais vu le jour.
Aujourd'hui, le bilan est cruel : seuls 44 salariés ont été repris par un fabricant de mobilier pour entreprises, Ageco. Les autres ont été licenciés. Documents à l'appui, les anciens salariés sont convaincus que le projet du chef d'entreprise picard était une coquille vide. C'est la raison pour laquelle une petite centaine d'entre eux manifestaient, ce 21 novembre, devant le site de leur ancienne entreprise. «Whirlpool fabrique des chômeurs», pouvait-on lire sur la banderole de tête.
«Un interminable mensonge»
«Pourquoi il nous a fait autant de promesses il y a deux ans?», s'interroge Patrice Sinoquet, représentant CFDT Whirlpool.
«On a appelé au secours, été reçus au ministère mais ils ont mis plusieurs mois à bouger. Pendant ce temps, Decayeux assurait signer plein de contrats», déplore un représentant de la CGT. «On en a gros et on en a marre», résume un manifestant sur place au micro des chaines d'information.
De son côté, Whirlpool assure que son plan était «conforme à la loi». Alors qu'une enquête pour «abus de biens sociaux» a été ouverte par le parquet d'Amiens, l'avocat des anciens salariés conteste aux prud'hommes le motif économique des licenciements prononcés et a engagé une procédure «en responsabilité» au TGI d'Amiens.
Emmanuel Macron attendu de pied ferme
Le 22 novembre, le chef de l'Etat est donc attendu de pied ferme dans sa ville natale par les anciens salariés. «C’est moi qui ai demandé à les voir. Parce que je suis venu en campagne à un moment où ils avaient peur pour leur avenir. Je leur ai tenu un langage de vérité. […] Et comme eux, j’y croyais. Comme eux, j’ai été déçu », a-t-il expliqué dans un entretien au Courrier Picard.
Le chef de l'Etat cherche à casser son image de «président des métropoles» déconnecté des campagnes. Pas sûr que cette opération de communication suffise à rassurer les anciens salariés de Whirlpool.
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