Economie

Bruno Le Maire annonce la privatisation de la FDJ «dans les prochains mois»

Le ministre de l’Economie et des Finances a confirmé devant l’université d’été du Medef que la privatisation de la Française des jeux devrait se faire d’ici la fin de l’année. Mais la somme que l’Etat devrait en retirer reste la grande inconnue.

«Nous avons engagé la privatisation de la FDJ qui sera effective dans les prochains mois», a déclaré le 28 août Bruno Le Maire, ministre de l’Economie et des Finances, lors d’une intervention devant l’Université d’été du Medef à l’Hippodrome de Longchamp, près de Paris.

Le 6 juin dernier, interviewé sur BFMTV, il avait donné plus détails sur le processus de cession des parts que l’Etat détient au capital du monopole des jeux de tirage et de grattage, déclarant notamment : «Si les conditions de marché le permettent, la Française des Jeux sera privatisée d'ici la fin de l'année. Et j'ai engagé en toute transparence les recherches de banquiers et conseils pour pouvoir lancer cette opération […] d'ici la fin de l'année. […] Je veux le faire en associant les Français qui pourront participer au capital de la Française des Jeux et devenir actionnaires.»

Cette privatisation est un des éléments de la Loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, aussi appelée loi Pacte, promulguée définitivement (après rectification) le 15 juin 2019. Elle fait partie d’un programme de cessions d'actifs dont le but officiel est d’alimenter un fonds de 10 milliards d’euros voué à soutenir l'innovation et qui inclut les participations de l’Etat au capital du groupe industriel du secteur de l’énergie Engie, ainsi que d’ADP société exploitant notamment les aéroports de Paris (Orly et Roissy). Alors que le projet de privatisation d'ADP se heurte à référendum d'initiative partagée (RIP), le processus suit normalement son cours pour la FDJ.

La veille de l’intervention de Bruno Le Maire au rendez-vous annuel de l’organisation patronale, le Parlement avait donné son aval pour le renouvellement du mandat quinquennal de l’actuelle présidente de la Française des jeux Stéphane Pallez. C’est elle qui devra mettre en œuvre la privatisation de l'opérateur de loterie. Elle a fait valoir devant le Parlement une augmentation des mises de 5% par an au cours de son mandat et précisé que «La privatisation ne modifie[rait] pas le périmètre d'activité actuel de la FDJ». Elle a aussi affirmé que «l'entreprise resterait sous le contrôle étroit de l’Etat» lequel demeurera au capital «à hauteur de 20% minimum».

La FDJ pas si rentable que ça pour les actionnaires

En 2018, la FDJ a encaissé 15,8 milliards d’euros, dont 10,7 ont été reversés sous formes de gains aux joueurs et 785 millions d'euros aux détaillants. La FDJ verse directement à l’Etat une contribution avant bilan qui doit être maintenue après la privatisation et s’est élevée à 3,3 milliards d’euros en 2018.

Lors de son passage du 6 juin sur BFMTV le ministre de l’Economie avait toutefois émis une réserve à propos de la cession de ses parts au capital «d’ici la fin de l’année» en précisant : «si les conditions de marché le permettent». Or, d’importants signaux négatifs entraînent actuellement les bourses mondiales dans une tendance à la baisse.

Mais surtout, on peut se demander si cette privatisation ouverte aux particuliers sera si attractive et rapportera à l’Etat des gains significatifs. En juin, interrogé sur BFMTV par Jean-Jacques Bourdin sur le montant que l'Etat pourrait retirer de cette vente, Bruno Le Maire avait dit ne pas vouloir «donner de chiffre», précisant que la fourchette de quelques milliards d'euros parfois avancée était un «maximum».

Cette fourchette paraît même optimiste compte tenu de la rentabilité de la FDJ pour les actionnaires. Certes, la société rapporte chaque année plusieurs milliards d’euros à l’Etat, mais c'est grâce à la contribution directe qui est soustraite du bilan. Ainsi, sur près de 16 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2018, la FDJ n’a réalisé qu’un résultat net de 170 millions d’euros et n’a reversé que 100 millions d’euros de dividendes à l’Etat-actionnaire au titre de ses 72% de parts de capital. Autrement dit, 50% du capital de la FDJ n'aurait rapporté en 2018 que 69 millions d'euros de dividendes. 

A titre de comparaison, ADP qui a réalisé un chiffre d'affaires près de quatre fois inférieur à celui de la FDJ a encaissé un résultat net (part du groupe) près de quatre fois plus important que celui de la FDJ.

Lire aussi : En marche vers la privatisation d'ADP et de la FDJ ? Les députés valident le projet de loi Pacte