L’opérateur pétrolier français Maurel & Prom a annoncé qu’il était prêt à participer à un investissement de 400 millions de dollars (350 millions d’euros) pour développer la production de la société mixte vénézuélienne Petroregional del Lago.
Fin octobre, l’entreprise française d’exploration et d’exploitation pétrolières avait racheté pour 70 millions d’euros les 40% que l’anglo-néerlandais Shell détenait dans cette co-entreprise qui exploite le champ pétrolier Urdaneta West situé sur le Lac Maracaibo au Venezuela.
Les deux autres partenaires sont Corporacion Venezolana del Petroleo (CVP) et PDVSA Social (PDVSAS), filiales à 100 % du groupe public Petroleos de Venezuela SA (PDVSA). La production estimée du champ d’Urdaneta pour l’année 2018 s’élève à environ 15 500 barils de pétrole par jour, soit environ 6 200 barils par jour pour la participation de Maurel & Prom.
Mais le groupe estime que «des interventions ciblées sur les puits au cours des premiers mois d’exploitation pourraient avoir un impact significatif sur la production». En outre, l’entreprise française considère que le gisement d’Urdaneta «offre un potentiel de croissance élevé via le développement de ressources supplémentaires et la prolongation possible de la durée de la licence au-delà de son terme actuel en 2026».
Investir dans une société pétrolière vénézuélienne ne présente-t-il pas un risque important de sanctions de la part des autorités américaines ? En effet, les pressions de l’administration Trump, s’accumulent de mois en mois sur l’Etat latino-américain et en particulier sur ses actifs.
En mai dernier, juste après la réélection de Nicolas Maduro à la présidence de la république bolivarienne, Donald Trump a signé un décret interdisant à toute personne morale ou physique étasunienne d’acheter de la dette vénézuélienne. Et PDVSA, la compagnie pétrolière publique du Venezuela dont Maurel & Prom est l'associé dans Petroregional del Lago, est déjà visée par deux décrets présidentiels, les executive orders 13808 et 13805.
Une «opportunité extraordinaire»
Chez Maurel & Prom, on répond que l’activité d’exploration et d’exploitation pétrolière est par nature exposée au risque politique, comme le montre, par exemple la tentative récente de coup d’Etat au Gabon. En effet, dans ce pays Maurel & Prom exploite le gisement d’Ezanga et mène des travaux d’exploration sur deux autres sites. Mais le service communication du pétrolier français explique aussi que «le Venezuela représente une opportunité extraordinaire» et que le pétrole extrait est destiné aux marchés asiatiques.
En décembre, lorsque le groupe français avait confirmé son rachat des parts de Shell dans le gisement vénézuélien, Michel Hochard, directeur général de Maurel & Prom, avait déclaré : «Les investissements dans les projets pétroliers et gaziers nécessitent une approche sur le long terme, et nous nous attendons à ce que le travail en collaboration avec PDVSA et ses filiales nous aide à renforcer le développement du champ dans les années à venir.»
Il est vrai que Maurel & Prom n’a pour le moment payé, à la finalisation de l’accord, que 47 millions d’euros, les 23 millions restant n’étant dus qu’en décembre 2019. En outre, l’accord signé avec les sociétés vénézuéliennes prévoit que les éventuels investissements dans l’exploitation du gisement d’Urdaneta ne seront financés que par le produit de la vente de la production actuelle.
N’empêche, le cours de l’action de Maurel & Prom, coté à Euronext Paris, a enregistré une importante baisse depuis octobre 2018, après un plus haut atteint en juillet à 6,51 euros. Au cours de clôture du 7 janvier, l’action valait 3,38 euros contre un peu moins de 4 euros un an plus tôt. Mais il est vrai que toutes les valeurs pétrolières ont été chahutées au cours du dernier trimestre 2018 en raison de la volatilité et de l'imprévisibilité des cours du brut.
Créé en 1831 comme opérateur de lignes maritimes entre la France et l’Afrique de l’Ouest, Maurel & Prom s'est depuis diversifié dans l'activité pétrolière, principalement au Nigéria et au Gabon. Le groupe employait 538 personnes fin 2017, la plupart en Afrique. Depuis une OPA amicale en 2017, 70% environ de son capital est détenu par l'entreprise publique indonésienne Pertamina.
Jean-François Guélain
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