Economie

Tout bien réfléchi, Peugeot aussi se soumettra à la justice américaine et quittera l’Iran

Après avoir annoncé que la stratégie de PSA ne changerait pas après le retrait américain de l'accord sur le nucléaire iranien, le groupe annonce son départ, tirant ainsi un trait sur son marché le plus dynamique et 40 ans de présence industrielle.

Le groupe PSA a annoncé le 4 juin qu’il avait «commencé le processus de suspension des activités de ses JVs [joint ventures, en Iran], afin de se conformer à la loi américaine d'ici le 6 août 2018». Il ajoute qu’il est, avec le soutien du gouvernement français, «en contact avec les autorités américaines pour envisager une dérogation».

Depuis la signature de l’accord sur le nucléaire iranien à Vienne le 14 juillet 2015 et la levée des sanctions internationales contre l'Iran, le Groupe PSA avait signé des accords de joint-ventures avec les sociétés iraniennes Iran Khodro le 21 juin 2016 et Saipa le 6 octobre 2016.

Constructeur historique en Iran, dont il s’était déjà retiré une fois, en 2012, sous pression américaine, PSA y a vendu 444 600 véhicules en 2017, presque autant que son record de 458 000 véhicules en 2011. Il s'agit toutefois de modèles anciens – des 405 et des 206 –produites par ses partenaires locaux et ne lui rapportant que des royalties, modestes aux dires du groupe.

Malgré tout, le groupe, dont la marque Peugeot représente environ un tiers du marché automobile iranien, avait prévu d'en rajeunir le parc en assemblant localement des modèles Peugeot 2008 et Citroën C3. 15 jours après l’annonce du retrait des Etats-Unis de l’accord, la directrice de la marque Peugeot, Linda Jackson, citée par Reuters, affirmait le 24 mai que la stratégie du groupe en Iran demeurait inchangée malgré le rétablissement des sanctions américaines contre l’Iran.

Le groupe se félicitait alors de la vente de 2 000 Citroën C3 en une heure seulement, le jour du lancement en Iran de ce modèle. Le groupe précisait malgré tout qu’il restait «prudent» et attentif en attendant «une position claire» de l’Union européenne sur les sanctions américaines et les perspectives commerciales dans la République islamique.

Depuis, la Commission européenne a annoncé, le 18 mai, le lancement d’une procédure d'activation du règlement dit «de blocage», afin de contrecarrer les effets extraterritoriaux des sanctions américaines pour les entreprises européennes voulant investir en Iran.

Ce dispositif légal européen doit permettre aux entreprises et tribunaux européens de ne pas se soumettre à des réglementations sur des sanctions prises par des pays tiers. Il édicte qu'aucun jugement décidé par des tribunaux étrangers sur la base de ces réglementations ne saurait s'appliquer dans l'UE.

Bruxelles incapable de rassurer les entreprises européennes en Iran

Mais c'est apparemment insuffisant pour PSA. Bien qu'il ne vende plus de véhicules aux Etats-Unis depuis des décennies, le groupe y est présenter via sa participation dans l'équimentier automobile Faurecia qui a réalise 26% de ses 17 milliards de dollars (14,5 milliards d'euros)en Amérique du Nord.

Auparavant, plusieurs groupes européens, comme l’énergéticien Total, le sidérurgiste italien Danieli et le danois Moller-Maersk, leader mondial du fret maritime, ont déjà annoncé leur départ d'Iran, malgré les tentatives de l'UE de leur fournir un cadre juridique protecteur. 

Dans son communiqué daté du 4 juin, le constructeur automobile, co-propriété de la famille Peugeot, de l’Etat français et du géant chinois Dongfeng, précise que les activités du Groupe PSA en Iran représentant moins de 1% de son chiffre d'affaires, et que son départ «ne modifie ni les objectifs généraux […], ni les orientations financières actuelles».

PSA tire un trait sur un marché qui a pesé 12% des ventes de ses marques en 2017 

Pourtant en janvier, PSA avait publié des chiffres qui montraient que ses ventes en Iran avait représenté en 2017 près des trois quarts de son activité au Moyen-Orient, loin devant Israël et la Turquie, et plus de 12% de ses ventes mondiales. C'était de plus un marché où le groupe avait signé des projets d'investissement pour des centaines de millions d'euros.