Economie

Surenchère : la Chine répliquera aux restrictions douanières américaines «quel qu’en soit le coût»

L’escalade des menaces entre les Etats-Unis et la Chine est montée d’un cran : le montant des exportations chinoises qui pourraient être taxées est désormais de 150 milliards de dollars. Comme au poker, la Chine se dit prête à suivre…jusqu’au bout.

La Chine a assuré ce 6 avril ne pas craindre le prix que pourrait lui coûter une guerre commerciale avec les Etats-Unis, après que Donald Trump a fait monter les enchères en menaçant de taxer les importations chinoises à hauteur de 100 milliards de dollars supplémentaires. Ces mesures s'ajouteraient aux quelque 50 milliards de dollars de taxes déjà annoncées le 3 avril par Washington.

Ainsi, le président des Etats-Unis a déclaré dans un communiqué : «J'ai demandé au ministère du Commerce d'examiner si 100 milliards de dollars supplémentaires de tarifs douaniers seraient adaptés en application de l'article 301 (sur la propriété intellectuelle) et, dans ce cas, d'identifier les produits sur lesquels ils pourraient être imposés.»

Lors d’une rare conférence de presse, un porte-parole du ministère chinois du Commerce cité par l’agence d’Etat Xinhua (Chine nouvelle) a déclaré que la Chine répliquerait «quel qu’en soit le coût» et prendrait des «contre-mesures complètes» en réponse aux dernières entraves au commerce avec elle décidées par les Etats-Unis.

Preuve que la pression est en train de monter sérieusement, la réaction du ministère du Commerce a été complétée par celle du ministère des Affaires étrangères, dont le premier porte-parole, Lu Kang, a déclaré :

Si les Etats-Unis ignorent les objections de la Chine et de la communauté internationale en persistant dans l’unilatéralisme et le protectionnisme, la Chine suivra jusqu’au bout et répliquera de façon résolue quel que soit le coût

Pour les Etats-Unis, leurs mesures sont justifiées, mais pas les réponses de la Chine

A la différence de la Chine, qui a annoncé qu’elle porterait ce différend devant un panel (procédure d’arbitrage propre à l’OMC) les Etats-Unis fondent leurs mesures uniquement sur leur propre législation. De plus, ils considèrent officiellement qu’elles sont justifiées tandis que les réponses de la Chine ne le sont pas. Ainsi, le dernier communiqué du Bureau du représentant américain au commerce (United States Trade Representative - USTR) affirme : «Malheureusement la Chine a pour le moment choisi de répondre en menaçant d’imposer des droits de douane injustifiés sur des milliards de dollars d’exportations américaines, comprenant nos produits agricoles. De telles mesures nuiront inévitablement aux ouvriers, agriculteurs et entreprises des Etats-Unis.»

Pour le moment, cette surenchère, n'est que verbale. Le représentant américain au commerce Robert Lighthizer a pris soin de préciser que, comme les mesures de rétorsion commerciale annoncées le 3 avril, les nouvelles mesures n'entreraient en vigueur qu'à l'issue d'un processus de consultation publique d’une durée d’au moins 30 jours.

Quant au conseiller économique de Donald Trump, Larry Kudlow, il a laissé planer le doute sur la tenue de pourparlers directs avec la Chine lors d’une interview avec Bloomberg TV, affirmant qu’ils n’avaient pas commencé mais pourraient débuter «dans les prochains mois».

Néanmoins, la perspective d'un conflit commercial réel inquiète les investisseurs et les cours de Bourse en pâtissent depuis quelques jours, jouant au yo-yo au gré des déclarations des deux parties. Pour les analystes du cabinet international de prospective Oxford Economics : «Une guerre commerciale totale pourrait avoir des effets prononcés. Les Etats-Unis et la Chine souffriraient chacun d’un ralentissement de leur croissance d’un point.»

En attendant, le 6 avril en début de matinée (à New York), les principaux indices de Wall Street (Dow Jones, Standars and Poors) étaient en baisse ainsi que le dollar et certaines matières premières comme le cuivre. A l'inverse, les valeurs refuge comme le yen japonais et l’or étaient en hausse. Un reflet, jusqu’à la prochaine annonce, de l’inquiétude des investisseurs notamment sur les marchés d'actions.

«C’est à ça que ressemble une guerre commerciale, ce contre quoi nous avons mis en garde dès le début», a déclaré Matthew Shay, président de la Fédération américaine du commerce de détail, lequel a appelé le président Donald Trump à «arrêter de jouer à se faire peur sur le dos de l’économie américaine.»