Pour la troisième fois de son histoire, le conglomérat industriel et financier General Electric (GE) a annoncé le 13 novembre qu’il diviserait par deux le dividende trimestriel versé à ses actionnaires.
Depuis janvier, la capitalisation boursière du groupe a fondu de près de 100 milliards de dollars et le jour de cette annonce, le cours de l’action GE, cotée à la bourse de New York, avait perdu sur 12 mois glissants près de 40% de sa valeur. Co-fondée par l’inventeur Thomas Edison en 1892, l’entreprise qui fut pendant des décennies la deuxième valeur du New York Stock Exchange (NYSE) derrière Exxon Mobil ne fait même plus partie aujourd’hui du Top 20 dominé par les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft).
Pour tenter de sauver ce qui peut l’être, John Flannery, le nouveau PDG du groupe en poste depuis le 1er août, a aussi annoncé le 13 novembre un plan de cession d’actifs pour 20 milliards de dollars en deux ans. General Electric, actif dans huit secteurs d'activité, dont le financement et le numérique, devrait se concentrer sur ses trois cœurs de métiers industriels : l'aéronautique (moteurs d'avions), l'équipement médical et l'énergie. John Flannery a aussi laissé entendre que le groupe pourrait à nouveau (après la saignée de 2016) supprimer des milliers d'emplois dans le monde. En France le groupe emploie près de 16 000 personnes dans ses huit activité actuelles à travers une vingtaine d’implantations réparties sur tout le territoire, dont une douzaine de sites industriels.
345 emplois déjà menacés et des promesses d'embauches qui ne seront sans doute pas tenues
Si l’on ignore encore le nombre des emplois qui pourraient être supprimés en vertu de ce plan de crise, la direction a en revanche précisé que la branche GE Power, qui comprend le Français Alstom, allait connaître une grande refonte pour se remettre du retournement des marchés de l'énergie (baisse du prix des hydrocarbures et de l’activité des grandes compagnies pétrolières). Elle a précisé que cette refonte serait accompagnée d’un plan d’économies d'un milliard de dollars d’ici 2018. Or, John Flannery, cité par l’AFP, a aussi déclaré le 13 novembre : «Alstom est très décevant», précisant que le groupe espérait une croissance à deux chiffres d’au moins 15% par an, mais qu’elle serait sans doute de moins de 10%.
Autant dire qu’il serait miraculeux que la direction recule sur les suppressions d’emplois déjà annoncées, elles, depuis l’été chez GE Hydro. 345 emplois sur 800 sont déjà menacés dans cette filiale grenobloise leader mondial des turbines hydrauliques pour barrages électriques. Elle faisait partie des activités énergie du groupe Alstom, dont Emmanuel Macron, alors ministre de l’Economie avait autorisé le rachat fin 2014.
General Electric devra tenir ses engagements qui sont la création de 1 000 emplois net à la fin de l'année 2018. […] Cet engagement est toujours valable et nous nous assurerons qu'il soit tenu
Bruno Le Maire a reçu une délégation de GE Hydro
On devrait connaître, d’ici le 18 novembre, les résultats d'une entrevue entre le ministre de l’Economie et une délégation de syndicalistes et représentants du personnel de GE Hydro, qui par un hasard de calendrier, se tenait le jour même où le nouveau PDG de General Electric annonçait des milliers de licenciements dans le monde. Mais rien ne permet d’être optimiste, malgré les déclarations de Bruno Le Maire, le 16 octobre sur France Info qui promettait : «General Electric devra tenir ses engagements qui sont la création de 1 000 emplois net à la fin de l'année 2018. […] Cet engagement est toujours valable et nous nous assurerons qu'il soit tenu.» En effet, en dehors de la conjoncture nouvelle, extrêmement défavorable, le ministre avait aussi estimé, le 16 octobre, que «le marché hydroélectrique [était] saturé». Une analyse difficile à comprendre, en France où l’énergie hydro-électrique est la première des énergies renouvelables, très loin devant l’éolien et le solaire et essentielle pour permettre au pays de tenter de respecter les engagements de la loi de transition énergétique de 2015.
D’autant que pour EDF, et donc l’Etat actionnaire, l’électricité produite à partir de l’énergie des barrages est la plus rentable et représenterait 50% du bénéfice d'EDF. En effet, pouvant être appelée à tout moment (contrairement à l'énergie des centrales nucléaires et thermiques), elle peut se négocier à prix d’or sur les marchés de l’interconnexion européenne, à des moments où sur des pics de consommation, le coût du kilowattheure peut connaître des variations de prix dignes du Bitcoin. Mais ce qui est pertinent pour l'Etat français ne l'est pas forcément pour le groupe américain.
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