Economie

Les ex-actionnaires de Ioukos renoncent à saisir des actifs russes en France

Après plusieurs procédures judiciaires initiées pas les anciens actionnaires du groupe pétrolier russe contrôlé par Mikhaïl Khodorkovski, ces derniers ont renoncé à leurs prétentions financières contre l'Etat russe qui a nationalisé le groupe.

Un groupement d'ancien actionnaires de Ioukos, compagnie pétrolière de l'oligarque déchu Mikhaïl Khodorkovski, ont décidé de renoncer à saisir des actifs russes en France dans le cadre du bras de fer judiciaire qui les oppose depuis plus de dix ans à la Fédération de Russie. C'est ce qu'a annoncé son porte-parole, Jonathan Hill.

«Il n'est plus économiquement efficace de poursuivre l'exécution des sentences arbitrales en France», a annoncé Jonathan Hill, porte-parole de GML, société basée à Gibraltar qui réunit les anciens actionnaires majoritaires, le 10 octobre à l'AFP.

«Les avoirs placés sous séquestre par GML en France représentaient environ 800 millions d'euros. Mais, après les récents succès judiciaires de Moscou, seuls 30 millions sont encore entre nos mains. Nous y renonçons aujourd'hui», a relevé Jonathan Hill.

Plusieurs centaines de millions d'euros avaient été gelés en France, attisant les tensions entre Paris et Moscou. Ces bloquages avaient été effectués à la suite d'une décision de la Cour d'arbitrage de La Haye de juillet 2014. La Cour avait accordé un dédommagement record de 50 milliards de dollars (42,5 milliards d'euros au cours actuel) aux ex-actionnaires, estimant que la mise en faillite de Ioukos onze ans plus tôt avait été organisée par Moscou à des fins politiques.

Six mois plus tard, un juge français avait estimé que cette sentence arbitrale était applicable en France, autorisant de facto GML à y opérer des saisies pour obtenir réparation.

Ces opérations avaient provoqué l'ire de Moscou qui, jugeant ses intérêts stratégiques menacés, avait multiplié les recours devant les juridictions françaises pour les faire invalider. Avec succès : la plupart des saisies ont depuis été levées. Pour autant, ces annulations n'empêchaient pas les ex-actionnaires d'engager de nouvelles procédures.

L'affaire Ioukos, saga judiciaire hors norme au regard des montants en jeu, est loin d'être close. En avril 2016, un tribunal néerlandais a annulé l'arbitrage de juillet 2014. Il appartient désormais à une cour d'appel néerlandaise de se prononcer courant 2018 sur sa validité.

La GML, holding de l'oligarque en exil Khodorkovski

Le contentieux remonte à 2003, année où la compagnie pétrolière russe est accusée de fraude fiscale. Trois ans plus tard, en 2006, Ioukos est déclaré en faillite par la justice russe, puis revendu à l'opérateur public Rosfnet, dans ce qui revient à une nationalisation de facto.

D'ailleurs, à partir des années 2000, Ioukos avait entamé un rapprochement avec des groupes pétroliers américains. Il était même prévu qu'Exxon Mobil et Chevron Texaco rachètent la majorité des parts du géant énergétique russe en 2003, avec l'objectif de faire passer sous pavillon américain un fleuron énergétique et stratégique russe. Une fusion entre Ioukos et Sibneft (aujourd'hui le géant du gaz Gazprom) était également envisagée, ce qui aurait fait passer l'essentiel du secteur énergétique russe sous le contrôle d'intérêts américains.

Quant à son président, Mikhaïl Khodorkovski, il a été condamné pour détournement de fonds, évasion fiscale et blanchiment d'argent. Il a passé 10 ans en prison avant d'être gracié par Vladimir Poutine, pour raisons humanitaires, en décembre 2013.