Economie

Nouveau revers, en France, pour les actionnaires de Ioukos : l'agence spatiale russe ne paiera pas

Les ex-actionnaires du géant russe de l'énergie Ioukos avaient réussi à faire saisir des avoirs de l'agence spatiale russe estimée par eux assimilable à l'Etat russe auquel ils réclament 50 milliard de dollars. La Justice française leur a donné tort.

La tentative de faire payer l'agence spatiale russe, Roscosmos, pour le contentieux opposant les ex-actionnaires de l'ancien géant de l'énergie Ioukos à l'Etat russe a échoué. La cour d'appel de Paris a ordonné ce 27 juin 2017 de débloquer 300 millions d'euros dus par Arianespace à l'agence spatiale russe, des fonds saisis par les anciens actionnaires de Ioukos qui contestent la nationalisation de la compagnie pétrolière russe par le gouvernement russe dans les années 2000. «Pas une fois les oligarques, anciens actionnaires de Ioukos, n'ont vu leur argumentation en matière de saisie de biens d'établissements publics russes prospérer devant les juridictions françaises», s'est félicitée Maître Andrea Pinna, avocat de la Fédération de Russie.

Celle-ci faisait ainsi référence à plusieurs saisies faites en France au bénéfice des ex-actionnaires de Ioukos regroupés dans la holding basée à Gibraltar GML, elle-même propriétaire de Ioukos jusqu'en 2005.

Dans son arrêt, la cour d'appel a estimé que Roscosmos était, contrairement aux arguments des plaignants, une entité juridique séparée de la Fédération de Russie. Au vu de son autonomie budgétaire et financière, Roskosmos ne saurait être tenu par les dettes éventuellement dues par Ioukos à ses anciens actionnaires.

L'imbroglio judiciaire rebondit en juillet 2014, lorsqu'un tribunal arbitral à La Haye avait condamné la Fédération de Russie à verser 50 milliards de dollars aux ex-actionnaires de Ioukos expropriés en 2005. La Russie refusant d'appliquer ce jugement, la GML avait fait saisir des actifs russes dans plusieurs pays. C'est le cas de la France où 300 millions d'euros dus par Arianespace à l'agence spatiale russe Roscosmos avaient été bloqués. En octobre 2016, en réponse, l'agence spatiale russe avait menacé de cesser de livrer ses lanceurs Soyouz à Arianespace, qui utilise ce type de fusées pour lancer ses satellites, notamment Galileo, depuis son centre de Kourou en Guyane, tant que les paiements seraient bloqués.

La GML, holding de l'oligarque en exil Khodorkovski

Le contentieux remonte à 2003, année où la compagnie pétrolière russe est accusée de fraude fiscale. Trois ans plus tard, en 2006, Ioukos est déclaré en faillite par la Justice russe, puis revendu à l'opérateur public Rosfnet, dans ce qui revient à une nationalisation de facto.

D'ailleurs, à partir des années 2000, Ioukos avait entamé un rapprochement avec des groupes pétroliers américains. Il était même prévu qu'Exxon Mobil et Chevron Texaco rachètent la majorité des parts du géant énergétique russe en 2003, avec l'objectif de faire passer sous pavillon américain un fleuron énergétique et stratégique russe. Une fusion entre Ioukos et Sibneft (aujourd'hui le géant du gaz Gazprom) était également envisagée, ce qui aurait fait passer l'essentiel du secteur énergétique russe sous le contrôle d'intérêts américains.

Quant à son président, Mikhaïl Khodorkovski, il a été condamné pour détournement de fonds, évasion fiscale et blanchiment d'argent. Il passe 10 ans en prison avant d'être gracié par Vladimir Poutine, pour raisons humanitaires, en décembre 2013.

En 2005, Mikhaïl Khodorkovski prit soin de transférer tous ses avoirs à un associé, Leonid Nevzline. C'est ce dernier qui, depuis, contrôle de fait la holding GML qui poursuit l'Etat russe. En 2014, à peine libéré, Mikhaïl Khodorkovski rendait visite à ce Leonid Nevzline en Israël. Cet ancien partenaire avait alors assuré, comme le rapporte le magazine Challenges, que lors de leurs retrouvailles, les deux hommes n'avaient parlé que de leurs enfants et échangé des souvenirs.

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