La perspective du Brexit n’y change rien : la 22e et dernière édition en date de l’index bisannuel des centres financiers globaux (GFCI), paru en septembre, confirme la ville de Londres à la première place de la finance mondiale devant New York, Hong Kong, Singapour et Tokyo. Francfort, le premier centre financier de la zone euro selon le GFCI, n’arrive qu’en 11e position.
Pour le Royaume-Uni, l’enjeu est particulièrement important car les services financiers (banque et assurance) y représentent 7,3% de la main d’œuvre, soit environ 2 200 000 emplois (contre 600 000 en France) et 12% des recettes fiscales de l’Etat.
Londres arrive en tête dans tous les domaines de compétitivité...
Attention, le classement GFCI créé en 2007 par la société Z/Yen, basée à Londres, ne mesure pas les résultats économiques (volume des échanges ou des actifs gérés, par exemple) d’opérateurs boursiers comme Euronext Paris ou le London Stock Exchange. Il établit seulement un classement des grandes métropoles mondiales de la finance selon une centaine de ce qu’il appelle des «critères de compétitivité». Ceux-ci sont classés par l'étude en cinq grands domaines : environnement d’affaires, capital humain, infrastructures, développement du secteur financier et réputation. Or, Londres arrive non seulement en tête du classement général, mais également en tête de chacun des cinq classements par domaine de critères de compétitivité.
Mais occuper la première place d’un classement et retenir les emplois sont deux choses différentes. Au début du mois de juin 2016, 15 jours avant le vote sur la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne ou son maintien au sein de l’Union, Jamie Dimon, président de la banque américaine JP Morgan qui emploie 19 000 personnes au Royaume-Uni, cité par toute la presse britannique, avait déclaré que le choix du Brexit menacerait jusqu’à 4 000 emplois au Royaume-Uni. Depuis, la banque a annoncé qu’elle allait relocaliser plusieurs centaines d’emplois à Dublin, Francfort et Luxembourg.
En octobre dernier, le Français Xavier Rolet, président du London Stock Exchange (société de bourse basée à Londres), qui s’exprimait sur les risques de voir les activités de compensation en euros quitter Londres, avait brandi un épouvantail en déclarant à l’agence Bloomberg : «Nous estimons, de façon conservatrice, qu'au minimum 100 000 emplois, dans la gestion du risque, la conformité, le middle et le back-office, les fonctions supports, pas seulement à Londres mais dans la région, sont impliqués dans cette activité et sont clairement en danger.»
...mais 100 000 emplois dans la finance seraient menacés
Enfin, de retour du dernier sommet annuel de Davos, le correspondant du quotidien britannique Financial Times affirmait, en janvier 2017, que les principaux dirigeants des banques UBS, JP Morgan et HSBC allaient délocaliser des milliers d’emplois actuellement basés à Londres.
Une compétition féroce est donc en train de s’établir entre les quatre ou cinq centres financiers européens qui pourraient, à terme, accueillir les exilés de la finance post-Brexit.
Une récente étude, publiée par les équipes de KPMG au Grand-Duché du Luxembourg, montre que sur les 50 institutions financières ayant déjà annoncé leur intention de quitter Londres, 21 ont choisi Luxembourg, 13 Dublin, 8 Francfort et une Paris. Ainsi, HSBC déplace 1000 emplois à Paris mais conservera son siège à Londres.
En juillet dernier, c’était au tour de la banque d’affaire américaine Morgan Stanley d’annoncer son choix de déplacer sa plateforme financière à Francfort pour y doubler ses effectifs locaux, les faisant passer de 200 à 400 personnes, tout en renforçant ses équipes à Paris et à Dublin, au détriment des équipes basées à Londres. Mais le remplacement de Londres, où Morgan Stanley emploie aujourd’hui 5 000 personnes, n’est pas pour demain.
De son côté, Paris a annoncé, le 7 juillet 2017 une série de mesures essentiellement fiscales destinées à attirer les entreprises du secteur financier désireuses (ou contraintes) de quitter Londres. Parmi elles, l’abrogation de l'extension prévue en 2018 de la taxe sur les transactions financières (TFF) et l'exclusion des bonus du calcul des indemnités de licenciement de certains employés comme les traders.
Mais, Paris est encore très loin d'être a priori une destination de la finance, même si la capitale française a progressé au classement du GFCI, passant en une dizaine d'années de la 40e à la 23e position.
«En tant que place de repli en Europe à la suite du Brexit, Paris est aujourd'hui le cinquième choix des dirigeants de grandes banques après Dublin, Amsterdam-Bruxelles, Luxembourg, et Francfort», regrettait Marie-Anne Barbat-Layani, directrice générale de la Fédération bancaire française, citée par Challenge en octobre 2016.
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