Economie

Les banques européennes réalisent un quart de leurs bénéfices dans des paradis fiscaux

En se basant sur les données fournies par les banques, l'ONG Oxfam a publié un rapport dans lequel elle dénonce leurs profits «ahurissants» dans les paradis fiscaux. En cause : les transferts de bénéfices qu'elles réalisent pour échapper à l’impôt.

L'ONG Oxfam (une confédération regroupant 18 organisations indépendantes qui agissent «contre les injustices et la pauvreté») s'est penchée sur les activités financières des 20 plus grands établissements bancaires européens, profitant de l'entrée en vigueur de l'obligation qui incombe aux banques de l'Union européenne de publier leurs données.

Et les chiffres mis en lumière donnent le vertige. L'ONG a découvert que les banques européennes réalisent 26% de leurs bénéfices dans des paradis fiscaux – principalement en Irlande et au Luxembourg – alors qu'elles n'y ont que très peu de leurs forces vives, seulement 7% de leurs employés, et qu'elles n'y réalisent que 12% de leur chiffre d'affaires.

Des disparités qui interrogent d'autant plus quand on rentre dans le détail des chiffres, où les situations incongrues et hautement improbables sont légion. Oxfam a par exemple comparé la rentabilité d'un employé de la banque britannique Barclays d'un pays à l'autre. Au Luxembourg, un employé lui rapporte 13 millions d'euros de bénéfices par an, soit... 348 fois plus que la moyenne mondiale de la banque (38 000 euros).

Mais il y a encore mieux, note l'ONG, puisqu'une partie non négligeable des bénéfices réalisés dans les paradis fiscaux (au moins 628 millions d'euros) est obtenue sans que les banques n’emploient le moindre salarié dans les pays concernés.

Pour rester dans les chiffres étourdissants, il est intéressant de constater qu'avec 4,9 milliards d'euros de bénéfices au Luxembourg, les banques européennes y dégagent autant de bénéfices qu'au Royaume-Uni, en Suède et en Allemagne réunis. Ou encore que la Société générale déclare en Irlande un bénéfice quatre fois supérieur à son chiffre d'affaires : «C’est un peu comme si un boulanger qui vend un euro sa baguette récoltait 4 euros de bénéfices : c’est difficile à imaginer», explique Manon Aubry, co-auteur du rapport.

«On a essayé de comparer les bénéfices qu’elles déclarent dans ces paradis fiscaux avec leur activité réelle. Et on voit là un décalage énorme», affirme-t-elle encore.

Les conclusions d'Oxfam sont claires : les paradis fiscaux favorisent le transfert de bénéfices. En déplaçant artificiellement leurs bénéfices dans des pays à fiscalité faible, voire nulle, les banques échappent ainsi à l'impôt.

Les paradis fiscaux sont un des chevaux de bataille de l'ONG. L'année dernière, elle avait déjà publié un rapport similaire sur les activités des banques françaises, dénonçant les cinq milliards d’euros de bénéfices réalisés par les établissements de l’Hexagone dans des pays à la fiscalité très avantageuse.

Lire aussi : Rapport d'Oxfam sur les inégalites : «On est arrivé probablement au bout du processus»