Economie

Derniers vœux de Barack Obama et bilan économique : déni de réalité ?

Au terme de huit ans de présidence, Barack Obama a consacré les deux tiers de son intervention à la défense de son bilan. Un pays plus fort, plus respecté, et des Américains plus riches, selon lui. Mais d'autres chiffres dessinent une autre Amérique.

«Il y a huit ans alors que je m'apprêtais à prendre mes fonctions, l'économie était sur le point de s'effondrer», commence le président, se référant à la faillite de la Lehman Brothers et de la crise financière dite des subprimes. «Huit ans plus tard, vous avez changé l'histoire», constate Barack Obama. «15,6 millions d'emplois ont été créé depuis 2010».

L'autre visage des statistiques

Le président sortant confond-il les chiffres de créations d'emplois avec la baisse du chômage ? La création de 15,6 millions d'emplois ne signifie pas que le nombre de chômeurs ait baissé d'autant, car le chômage ne baisse que si les créations sont plus nombreuses que les destructions. En l'occurrence, le solde entre créations et destructions d'emploi semble, en apparence, se traduire par une baisse du taux de chômage, lequel s'établit à 4,9 %, selon le chiffre officiel.

Mais c'est oublier la baisse continue du taux de participation des américains à l'économie. C'est-à-dire le nombre total de personnes qui sont sur le marché du travail, chômeurs comme travailleurs. Selon le Bureau of Labor Statistics (BLS), équivalent américain de Pôle emploi, qui ne préfère pas trop mettre en avant ce chiffre, les Américains ne sont ainsi que 62,7 %, à «participer» à l'économie américaine. Plus de 30 % ne travaillent pas. En clair : de nombreux américains privés de revenus ne sont pas comptabilisés dans les statistiques.

Plus d'Américains exclus du monde du travail et non comptabilisés

Pour la classe censée être la plus active, celle des 25-54 ans, le taux est même tombé de 98 % dans les années 1950 (on parle des personnes employées comme des chômeurs en recherche de travail) à seulement 88 % en 2016. Le faible taux de chômage officiel doit en réalité beaucoup à cette baisse de la population active réelle. Avec le même taux de participation qu'en 1990 (66 %) le nombre de chômeurs officiels ne serait pas de 8 millions et le taux de 4,9 %, mais de plus de 17 millions de citoyens américains. 

Et c'est sans compter la précarisation de ceux qui ont ou retrouvent un travail lors des cycles de destructions-créations d'emploi : En 2016, seuls 48 % des Américains ont encore un emploi à plein temps. Et plus de 14 % de la population totale a dû recourir à des bons alimentaires du programme SNAP en 2015, un indicateur qui permet d'évaluer la proportion de travailleurs pauvres et chômeurs (encore dans le système d'assistance).

On constate ainsi un décrochage statistique entre le nombre de bénéficiaires des «food stamps» et la courbe du chômage. Si les conditions d'attribution ont été quelque peu durcies, la baisse moindre de la courbe des bénéficiaires indique une exclusion d'une partie des chômeurs et travailleurs pauvres des statistiques, alors que les «tent cities», ces campements de tentes de SDF, se multiplient un peu partout aux Etats-Unis.

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Il n'empêche, Barack Obama s'est pourtant félicité de ses «choix difficiles». Selon le président sortant, «la pauvreté baisse, les revenus croissent», et la société américaine serait moins inégalitaire. Après, certes, un rebond de 5,2 % en 2016 à 56 516 dollars, le revenu médian des foyers américains n'est pas encore revenu au niveau de 1999, à 57 909 dollars. Entretemps, selon le Bureau du recensement des Etats-Unis, la proportion de propriétaires de leur logement est tombé de 69 à un peu plus de 63 %.

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