C’est le 9 mai, jour de la fête de l’Europe, que les ministres des Finances de la zone euro ont choisi pour décider, une nouvelle fois, de l’avenir des Hellènes. La veille, Alexis Tsipras faisait voter plusieurs mesures d'austérité impopulaires. La condition sine qua non à l'obtention d'une nouvelle tranche d'aide pour mener à bien le plan de sauvetage décidé l'été dernier avec les créanciers. Vous n'avez pas tout suivi ? RT France vous propose une séance de rattrapage.
- Touchée de plein fouet par la crise financière de 2008, la Grèce voit sa dette augmenter dans des proportions incontrôlables. Pour éviter la ruine, le pays n’a d’autre choix que de demander l’aide de la «troïka» (Union européenne, Banque centrale européenne, Fonds monétaire international). Entre 2010 et 2012, les créanciers accordent deux plans d’aide aux Hellènes. Mais les quelques 240 milliards d’euros versés ne permettent pas au pays de se redresser. Athènes est obligée d'emprunter pour rembourser d'autres prêts. Le cercle vicieux est enclenché.
- A l’été 2015, la situation est de plus en plus tendue. Faisant face à des échéances de remboursement se chiffrant en milliards d’euros, Alexis Tsipras abandonne bien vite ses espoirs de renégociation de la dette avec les créanciers et cède du terrain. Beaucoup de terrain. En échange d’un nouveau plan d’aide de 86 milliards d’euros, les bailleurs exigent un train de réformes d’austérité : baisse des pensions de retraites, augmentation des taxes et des impôts ou encore création d’un fonds de privatisation de 50 milliards d’euros. Ce dernier doit servir pour moitié à recapitaliser les banques tandis que le reste de la somme ira au service de la dette et aux investissements. Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, souhaite le domicilier… au Luxembourg. Quelques jours après la signature de l'accord, une première tranche d'un montant de 23 milliards d'euros est débloquée.
- Début mars, le Fonds monétaire international (FMI) met la pression. Sans «réformes crédibles», l’institution basée à Washington ne participera pas à un nouveau plan d’aide. La réforme des retraites, jugée insuffisante, est dans le viseur. Alexis Tsipras parle de «manœuvres dilatoires», de «calculs erronés» et «d’attentes irréalistes». Quelques semaines plus tard, le site WikiLeaks met en ligne une conversation entre le chef du département européen du FMI, Poul Thomsen, et la chef de mission du FMI pour la Grèce, Delia Velculescu. Un défaut imminent d'Athènes sur le remboursement de la dette grecqueest évoqué. L’affaire pousse Athènes à demander des explications.
- Lorsque l’on parle de crise grecque, rien n’est simple. D’un côté, le FMI réclame des réformes drastiques au gouvernement. De l’autre, il milite pour un allègement de la dette grecque. Début mai, sa patronne, Christine Lagarde, envoie un courrier aux ministres des Finances de la zone euro. Elle leur demande d’étudier cette possibilité. Selon l’institution de Bretton Woods, la Grèce aura les plus grandes difficultés à sortir de la crise sans un allègement de sa dette. En octobre 2011, les banques avaient accepté de tirer un trait sur une partie de ce qu'Athènes leur devait. Non sans une grande résistance.
- Le cercle vicieux évoqué par le FMI a trouvé une illustration parfaite avec l’étude publiée début mai par l'Ecole européenne de management et technologie (ESMT). Selon elle, 95% de l’argent accordé à la Grèce au titre des deux premiers plans de sauvetage est allé… au remboursement de la dette. Laissant moins de 10 milliards d’euros pour relancer une économie plus que sinistrée.
- Du côté du gouvernement allemand, la proposition du FMI fait débat. Ceux qui veulent desserrer l'étau sont menés par le ministre de l’Economie, Sigmar Gabriel. Il appelle à «briser le cercle vicieux». En face, le partisan numéro 1 de l’orthodoxie budgétaire, Wolfgang Schäuble, juge un allègement de la dette «inutile». En tant que ministre des Finances, son avis compte double.
- Le 8 mai, l’atmosphère est irrespirable sur la place Syntagma d’Athènes. L’odeur du gaz lacrymogène emplit l’air alors que le Parlement s’apprête à voter plusieurs réformes très controversées. Retraites, impôts, sécurité sociale, Alexis Tsipras ne lésine pas sur les moyens pour convaincre ses collègues européens. Il semble y parvenir. Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne, parle d’objectifs «pratiquement atteints».
Le 9 mai, les ministres des Finances de la zone euro sont réunis à Bruxelles. A l’ordre du jour ? La validation des réformes engagées par Alexis Tispras. Ce sont elles qui conditionnent le versement des prochaines tranches d’aide. Mi-juillet, Athènes devra rembourser cinq milliards d’euros à la Banque centrale européenne. Des dettes pour des dettes. Seule lueur d’espoir : l'annulation d'une partie de la dette grecque. Elle sera discutée pour la première fois depuis plusieurs années. N’en déplaise à monsieur Schäuble.