Economie

Un récent témoignage confirme qu'il y a eu des fraudes lors de la privatisation de Ioukos

Le comité d’enquête russe a révélé que dans le cadre de l’enquête sur l’affaire Ioukos, des violations ont été commises lors de la privatisation de l’entreprise, remettant ainsi en cause la légitimité de la décision de la Cour de La Haye.

Le 25 mars, le représentant officiel du comité d’enquête de la Russie, Vladimir Markin, a déclaré que l’enquête sur l’affaire Ioukos, initiée en mars 2003, avait fait le constat d’une violation du droit de la concurrence au moment de la privatisation de la société dans les années 1990.

Guitas Anilionis, ex-directeur exécutif de la compagnie russo-suisse «Russian Trust and Trend» (RTT), témoin lors du premier procès de l’ancien PDG de Ioukos, Mikhaïl Khodorkovski, et du co-fondateur de la banque Menatep, Platon Lebedev, aurait fourni un témoignage écrit selon lequel RTT aurait été créée comme banque intermédiaire, servant notamment à l’organisation et à l’enregistrement des entreprises qui ont participé à la privatisation de Ioukos.

«Les entreprises fondées n’étaient pas juridiquement affiliées à RTT, mais étaient sous son contrôle», explique Guitas Anilionis. «Le réseau de coentreprises rassemblait près de 450 à 500 personnes morales russes et environ 100 à 200 entreprises off-shore, qui ne conduisaient aucune activité et étaient utilisées pour la tenue des actifs, des prêts et des bénéfices de Ioukos et d’autres exploitations du groupe», a-t-il ajouté.

Il a également raconté comment, avec l’aide de l’utilisation de cinq sociétés off-shore en 2000, la plupart des titres se sont retrouvés aux mains de la compagnie chypriote Hulley Enterprise. Cette dernière, contrôlée par Mikhaïl Khodorkovski, figure également parmi les entreprises ayant porté plainte devant la Cour d'arbitrage de La Haye pour réclamer une indemnisation à l'Etat russe.

Il a aussi ajouté que malgré le changement officiel de l'actionnariat de Ioukos, les actions seraient restées sous le contrôle de RTT, qui appartenait alors à Mikhaïl Khodorkovski et Platon Lebedev.

L’ancien directeur de RTT affirme également que le but des sociétés off-shore était de dissimuler non seulement les vrais propriétaires des entreprises, mais aussi d’autres actifs reçus par Menatep par le biais de la vente aux enchères. C’est justement Russian Trust and Trade qui aurait créé les sociétés Laguna et Reagent, qui ont toutes deux participé à la vente aux enchères des actions de Ioukos, alors que leurs directeurs étaient aussi des employés de RTT.

Ces révélations viennent remettre en cause la légitimité de la décision de la Cour d'arbitrage de La Haye, qui avait accordé une indemnisation de 50 milliards de dollars aux anciens actionnaires de Ioukos à l'été 2014.

En février, Moscou avait déclaré que le tribunal arbitral permanent de La Haye n’était pas compétent pour statuer sur les demandes des ex-actionnaires de Ioukos.

Peu de temps avant la divulgation de ce témoignage, le comité d’enquête de Russie avait déclaré illégale la privatisation de Ioukos en 1995, rapporte le site d’information Gazeta.ru. 

Le comité a expliqué que lors de la vente aux enchères de 1995, les sociétés qui ont racheté Ioukos ont été présentées comme des entreprises indépendantes alors qu’elles étaient en réalité contrôlées par Mikhaïl Khodorkovski.

Mikhaïl Khodorkovski, ancien PDG de Ioukos, a été arrêté pour la première fois en octobre 2003. Au terme d’un long procès, il a été reconnu coupable de fraude et d’évasion fiscales et condamné à neuf ans de colonie pénitentiaire. En 2009, au cours d’un nouveau procès, il a été accusé de détournement de fonds et de blanchiment d’argent. En 2010, il avait été condamné à 14 années de prison. En décembre 2013, il a été  gracié et libéré de manière anticipée. Cependant, deux ans plus tard, en décembre 2015, Mikhail Khodorkovski a été accusé d’avoir commandité l’assassinat de l'ancien maire de Nefteïougansk, en Sibérie.

La compagnie pétrolière russe Ioukos a été en activité de 1993 à 2007. Le 1er août 2006, Ioukos a été mise en faillite suite à la demande d’un syndicat de banques étrangères à qui la société devait 500 millions de dollars.