«Produire au tarif de l’énergie au prix du jour générerait des pertes intenables.» José-Luis Llacuna, président du verrier français Duralex, est catégorique : continuer la production cet hiver serait financièrement insoutenable.
Dans un communiqué daté du 1er septembre, le verrier de La Chapelle-Saint-Mesmin (Loiret) a annoncé l’arrêt de son four à compter de début novembre et ce pour une durée «minimum de quatre mois». En conséquence, une grande partie des 250 salariés de l’entreprise sera placée en chômage partiel, selon France Info. Durant cette mise en veille de l’usine, l’activité commerciale et logistique de l’entreprise devrait perdurer.
«Pour des raisons purement financières, parce que les prix de l'électricité et du gaz mettent en péril l'entreprise et l'emploi, nous sommes obligés de mettre en veille ce four» a insisté le dirigeant auprès du média public français. «L’énergie représentait de 5 à 7% de notre chiffre d’affaires il y a un an. Aujourd’hui, cela représente 40%», explique-t-il.
Toutefois, José-Luis Llacuna tient à se montrer rassurant. Selon lui, l’entreprise disposerait de «suffisamment de stocks» pour satisfaire ses clients jusqu’à la remise en chauffe de son four de fusion au printemps 2023, date à partir de laquelle l’entreprise aurait conclu ses accords de livraison d’électricité.
Electricité en France : la fin d’un âge d’or ?
«Nous avons fait l'acquisition d'énergie à des prix très élevés, mais acceptables, qui n'ont rien à voir avec les prix auxquels on va être soumis pendant les mois de novembre, décembre, janvier, février et mars de l'année prochaine», affirme encore le chef d'entreprise auprès de France Info.
Contrairement aux consommateurs, les entreprises ne disposent pas du bouclier tarifaire déployé par le gouvernement français à l’automne 2021 afin de minimiser la hausse des prix de l’énergie. Hausse alors provoquée par la reprise économique post-Covid ainsi que par une mauvaise performance du parc éolien européen les mois précédents.
Déjà à l’époque, face à des cours alors jugés prohibitifs, des filières industrielles particulièrement énergivores avaient été contraintes de mettre en berne leurs activités afin de ne pas produire à perte. Une situation inédite dans un pays où les différents acteurs économiques bénéficient d’une électricité à un coût en deçà de la moyenne européenne.
Un mécanisme d’aides «largement insuffisant»
Or, la situation n’a fait qu’empirer. La tension sur le marché européen de l’électricité, encore fortement dépendant des énergies fossiles, a été exacerbée par la baisse de régime des centrales nucléaires tricolores. Une fébrilité amplifiée quelques mois plus tard par l’intervention russe en Ukraine et les sanctions anti-russes prises par l'Occident pour condamner cette opération militaire.
Le 26 août, le prix du mégawattheure (MWh) pour 2023 en France dépassait le seuil des 1 000 euros sur le marché de gros, contre 85 euros un an plus tôt. Pour le mois de décembre prochain, le MWh s'échangeait même à plus de 1 600 euros.
Interrogé dans les médias sur un recours au Plan de résilience économique et sociale du gouvernement, José-Luis Llacuna juge son montant «largement insuffisant en vue de cette flambée des prix.» Ce plan avait été présenté mi-mars par le gouvernement Castex afin de venir en aide aux entreprises impactées par les conséquences du conflit en Ukraine, notamment par les sanctions prises à l’encontre de la Russie.