Afrique

Un «véritable carnage» dans l’est de la RDC : 773 morts et 2 880 blessés à Goma en quatre jours

Les autorités de la RDC font état d’un «véritable carnage» et d’un tableau «sombre» et «catastrophique» à Goma, dans le Nord-Kivu, alors que les médias font état de l’avancée des rebelles vers Bukavu, la capitale de la province du Sud-Kivu, qui fait craindre une escalade régionale.

Dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), au moins 773 personnes ont été tuées et 2 880 autres blessées lors des affrontements pour le contrôle de la ville de Goma entre les Forces armées congolaises (FARDC) et les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda, «en seulement quatre jours», soit entre le 26 et le 30 janvier, a annoncé le ministre de la Santé, Samuel Roger Kamba, lors d’un briefing de presse le 1er février. La veille, le gouvernement congolais avait évoqué un «véritable carnage» dans le compte-rendu de son Conseil des ministres.

Cité par l’agence de presse d’État congolaise ACP, le ministre de la Santé a précisé que le bilan des morts et des blessés, qu’il avait annoncé, concernait seulement les chiffres recensés «dans les structures de soin». «Malheureusement il y a beaucoup de blessés qui n’ont pas pu arriver [dans les centres de soin] parce que les conditions ne le permettent pas», a-t-il déploré. «Les chiffres devraient augmenter à mesure que davantage d'informations seront disponibles», a indiqué de son côté le porte-parole de l’ONU, Stéphane Dujarric, soulignant que le bilan annoncé n’était que «provisoire».

Sur le terrain des affrontements, alors que les médias font état de la chute de Goma, dans la province du Nord-Kivu, aux mains du M23 et des forces armées rwandaises, des rapports de presse indiquent que le groupe rebelle tente désormais de progresser dans la province voisine du Sud-Kivu, notamment vers la cité minière de Nyabibwe et la capitale de cette région, Bukavu. Sur le terrain, les agences humanitaires de l’ONU ont constaté un afflux de blessés qui cause «une saturation des capacités d’accueil au niveau des hôpitaux dans les villes de Goma et de Bukavu».

Alors que la situation humanitaire se «détériore rapidement» à Goma, le président Félix Tshisekedi a rappelé au gouvernement la nécessité de mettre en place un plan d’urgence humanitaire pour les populations affectées dans cette métropole qui compte plus de deux millions d’habitants, dont au moins 500 000 déplacés. Un tableau «sombre» et «catastrophique» de la situation à Goma a été par ailleurs dressé par le député national honoraire Jean-Baptiste Muhindo Kasekwa. De son côté, le Bureau des droits de l’homme de l’ONU (HCDH) a accusé le M23 d’avoir commis des «exécutions sommaires», au moins 12 personnes ayant été tuées entre le 26 et le 28 janvier.

Risque d’escalade régionale

Face à la percée des rebelles, les ministres des Affaires étrangères du G7 ont appelé le groupe M23 et l'armée rwandaise à cesser leur offensive en RDC. De son côté, le chef des opérations de paix de l’ONU, Jean-Pierre Lacroix, s’est dit «préoccupé» par l’avancée des rebelles vers Bukavu, la capitale de la province du Sud-Kivu, qui fait craindre selon lui une «escalade régionale». Le chef des opérations de paix s’est par ailleurs inquiété des risques d’escalade au-delà des frontières de la RDC que fait peser l'extension des combats au Sud-Kivu. «Si l’on tient compte du passé, cela pourrait potentiellement dégénérer en conflit régional plus vaste», a-t-il estimé.

Le président burundais a, lui, accusé le Rwanda de déstabiliser la région. «Si le Rwanda continue à faire des conquêtes, la guerre risque d’être généralisée», a-t-il averti. Ces déclarations interviennent sur fond de durcissement de ton ces derniers jours entre le Rwanda et l’Afrique du Sud, suite à un sommet virtuel de la Communauté d'Afrique de l'Est (EAC), le 29 janvier, auquel le chef de l'État de la RDC, Félix Tshisekedi, n'a pas participé. À cette occasion, le président rwandais, Paul Kagame, a accusé son homologue sud-africain, Cyril Ramaphosa, de «tordre la réalité», voire même de «mentir».

L’Afrique du Sud est l’un des principaux fournisseurs de contingents de la Mission de la Communauté de développement d'Afrique australe en RDC (SAMIDRC), déployée dans l’est du pays aux côtés de la Mission de l’ONU (Monusco) et de l’armée régulière de Kinshasa (FARDC). Alors que ces derniers tentent de contenir les rebelles, les efforts diplomatiques, tels que le processus de Luanda parrainé par l’Angola ou la récente tentative de médiation du Kenya, peinent à produire des résultats concrets face à l'absence de coopération du Rwanda.

La RDC est confrontée depuis plusieurs années à une guerre meurtrière provoquée par la rébellion du M23, actif au Nord-Kivu, dans l’est du pays. Le groupe armé a été créé en 2012 par des officiers entrés en rébellion contre le gouvernement central.