Une réunion bipartite, qualifiée d’«importante», entre hauts responsables tunisiens et libyens s’est tenue dimanche 9 juin pour aborder le sujet crucial pour les relations bilatérales de la fluidité du transit entre les deux pays. En clair : la réouverture du passage frontalier de Ras Jedir, fermé en mars dernier à la suite d'un échange de tirs côté libyen.
La réunion faisait suite à un entretien téléphonique le 7 juin entre le président tunisien, Kais Saïed, et le Premier ministre libyen, Abdelhamid Dbeibah, qui avaient évoqué «l’intérêt commun à surmonter tous les obstacles pour rouvrir le passage de Ras Jedir, à offrir les meilleures conditions aux voyageurs dans les deux sens et à faciliter les échanges commerciaux entre les deux pays».
Aucune date de réouverture n’a été annoncée à l’issue de cette réunion, à laquelle ont pris part le directeur général des Douanes tunisiennes, le directeur général de la Police des frontières de Tunisie, leurs homologues libyens, ainsi qu’un certain nombre de hauts fonctionnaires et activistes humanitaires des deux pays.
Un communiqué des Douanes tunisiennes a seulement indiqué que les discussions avaient porté sur « les mécanismes visant à rouvrir le passage de Ras Jedir à la circulation des passagers et des marchandises, afin de faciliter le transit dans les deux sens ».
« Problématiques pas encore résolues »
Présent à la réunion, Mustapha Abdelkebir, président de l’Observatoire tunisien des droits de l’homme, a affirmé, dans une déclaration au journal panarabe «Al Arab», que la question n’était pas seulement « logistique » et qu’il existait plusieurs problématiques «qui n’ont pas été résolues». Pour le président de l’observatoire non plus, la date précise de la réouverture du passage n'a pas encore été décidée.
Plus tôt dans la journée, M. Abdelkebir avait pourtant rapporté sur sa page Facebook que la réunion se déroulait «dans une ambiance positive». Il a souligné que les délégations tunisienne et libyenne poursuivaient leurs discussions pour examiner les mesures nécessaires à la réouverture de ce poste clé.
Plusieurs réunions similaires ont eu lieu entre la partie tunisienne et libyenne depuis la fermeture du passage le 19 mars dernier. Les deux parties sont convenues à maintes reprises d’une réouverture. Prévue en dernier lieu pour le 1er juin, elle a finalement été reportée.
Les échanges commerciaux stagnent depuis la fermeture
La réouverture tant attendue de cet important poste frontière intervient dans un contexte régional marqué par des tensions sécuritaires. La Libye s’est lancée en coopération avec les parties européennes dans une grande opération de sécurisation de ses frontières maritimes et terrestres, le passage frontalier de Ras Jedir étant au cœur des démarches.
Outre ses enjeux sécuritaires, Ras Jedir revêt une importante dimension sociale et représente un véritable poumon économique et commercial pour les deux pays. Les échanges commerciaux entre la Tunisie et la Libye ont connu une stagnation importante à la suite de sa fermeture depuis mars 2024.
Selon le Conseil d’affaires tuniso-libyen, cité par le quotidien tunisien « La Presse » le 10 mai dernier, la fermeture a eu des répercussions économiques majeures du côté tunisien, ayant déjà provoqué une paralysie complète de nombreux secteurs, qui ont été touchés par ce que certains analystes des deux pays appellent une « crise ».
À la suite d'un échange de tirs du côté libyen, les autorités tunisiennes avaient annoncé, en mars 2024, la fermeture du passage du poste-frontière de Ras Jedir, ville côtière à la frontière entre la Tunisie et la Libye, afin de préserver la sécurité de leurs citoyens qui se dirigeaient vers le territoire libyen.
«Des instructions immédiates ont été émises pour fermer le poste-frontière, après que des groupes hors-la-loi ont attaqué le passage pour créer le chaos et perturber le travail», avait confirmé alors le ministre libyen de l'Intérieur Imed Trabelsi.
Le passage de Ras Jedir est situé à Ben Guerdane, dans le gouvernorat de Médenine, au sud-est de la Tunisie, à environ 180 kilomètres de la capitale libyenne, Tripoli. Le deuxième passage frontalier est celui de Dhiba Wazen, dans la ville de Dhiba, situé dans le gouvernorat de Tataouine. Il est également fermé.