Au lendemain de l’invalidation, par les «Sages», du report des présidentielles, le président sénégalais Macky Sall a rompu le silence sous la forme d'un communiqué publié par ses services. Celui-ci «entend faire pleinement exécuter la décision du Conseil constitutionnel» et «mènera sans tarder les consultations nécessaires pour l’organisation de l’élection présidentielle dans les meilleurs délais», précise le texte.
«Dans les meilleurs délais», c'est précisément la fenêtre impartie le 15 février par le Conseil constitutionnel quand il a invalidé l'ajournement de la présidentielle au 15 décembre. Depuis, les appels se sont élevés de toutes parts, dans le pays et à l'étranger, à l'adresse du président Sall pour qu'il s'exécute.
Le Sénégal traverse l'une des pires crises politiques de son histoire post-indépendance depuis l'annonce le 3 février par le président Sall du report de facto de la présidentielle, prévue le 25 février. L'Assemblée nationale a ensuite repoussé le scrutin au 15 décembre après avoir fait évacuer l'opposition de force. Elle a prolongé le mandat du chef de l'État jusqu'à l'installation de son successeur.
Cet ajournement a provoqué des heurts qui ont fait trois morts lors de manifestations réprimées, qui ont donné lieu à des dizaines d'interpellations. De nouveaux appels à manifester ont été lancés pour ce 16 février après-midi ainsi que le 17 février.
Une invalidation saluée comme un facteur d’apaisement
La décision de la Cour constitutionnelle a été largement saluée comme un facteur d'apaisement, et les mots d'ordre ne trouvaient quasiment aucun écho vendredi en milieu d'après-midi à Dakar aux points de rassemblement où policiers et journalistes étaient plus nombreux que les manifestants.
L'opposition et la société civile criaient au «coup d'État constitutionnel» après le report, accusant le camp présidentiel de vouloir éviter la défaite de son candidat, le Premier ministre Amadou Ba, et suspectant Macky Sall de vouloir se maintenir au pouvoir.
Le président, pour sa part, a juré qu'il ne se représenterait pas pour un troisième mandat, justifiant le report par la crainte d'une contestation du scrutin susceptible de provoquer de nouveaux accès de violence après ceux de 2021 et 2023. Le Conseil constitutionnel, saisi par des opposants au report, a invoqué le principe d'«intangibilité» de la durée de cinq ans du mandat présidentiel.
La Commission économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), l'Union européenne, la France et le Royaume-Uni ont appelé les autorités à se conformer à la décision de la Cour. L'ajournement de la présidentielle avait alarmé d'importants partenaires internationaux, inquiets qu'un pays réputé pour sa stabilité dans une région troublée ne cède à la violence.