«L'absence de réponse des organisations internationales compétentes aux demandes de fournir des listes des personnes tuées à Boutcha indique qu'une mise en scène nécrophile y a eu lieu», a dénoncé la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères Maria Zakharova dans un entretien à RIA Novosti le 23 décembre.
Depuis le mois d’avril 2022, Kiev accuse l’armée russe d’avoir exécuté des civils à Boutcha, au Nord de Kiev. Des accusations réfutées par Moscou depuis près de deux ans, indiquant que ses troupes s’étaient retirées de la ville 48 heures avant l’entrée en ville des unités ukrainiennes. A l’époque, le drame avait été largement repris par les médias occidentaux, contribuant décisivement à la mobilisation européenne et américaine en faveur de Kiev.
Au début du mois de décembre 2023, Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères, lors d’une conférence de presse à l’issue du conseil ministériel de l’OSCE, avait réclamé la liste des victimes.
L'OSCE n'est pas au courant
L’agence RIA rapporte ce 23 décembre que le Bureau des droits de l’homme de l’OSCE lui a indiqué ne pas être en contact avec les autorités ukrainiennes sur cette question, mais a déclaré «comprendre» que celles-ci «rassemblent des preuves des crimes commis à Boutcha et dans d'autres endroits de la région de Kiev». Une réponse insuffisante selon les autorités russes.
«[Cette mise en scène] a été menée par le régime de Kiev sur instructions et avec la participation des Américains et des Britanniques», a poursuivi la porte-parole de la diplomatie russe. Et d’ajouter que celle-ci était fondée «sur la provocation du Troisième Reich à Nemmersdorf en 1944.»
Maria Zakharova avait déjà soulevé en avril 2022 une analogie entre Boutcha et le massacre de Nemmersdorf en octobre 1944, un village de Prusse orientale, nommé aujourd’hui Maïakovskoïe et se trouvant dans la région russe de Kaliningrad.
Le précédent de Nemmersdorf
Alors que l’Armée rouge avançait en territoire allemand à l’automne 1944, celle-ci investit le 21 octobre Nemmersdorf, avant que la localité ne soit reprise le 23 octobre par la Wehrmacht.
«Après la retraite forcée de Nemmersdorf, des spécialistes de la propagande allemande ont afflué dans la ville, notamment le chef du département de propagande du NSDAP pour la Prusse orientale, Karl Gebhardt», raconte Zakharova, avant d'ajouter que «le principal journal nazi, le Völkischer Beobachter, a publié rapidement un article intitulé "La fureur des bêtes soviétiques", décrivant en détail les tortures et meurtres découverts par les nazis». Une vaste campagne médiatique fut alors montée afin de pousser la population allemande à résister à l’armée soviétique, quelques mois avant la chute d’Adolf Hitler.
Et Zakharova de citer Bernhard Fisch. Ce vétéran des combats de Nemmersdorf, qui devint historien et remit en cause le narratif nazi, rapporta n’avoir vu aucun cadavre dans la ville quelques heures après le départ des troupes soviétiques. La propagande du Troisième Reich avait été jusqu’à diffuser des images de femmes crucifiées à des portes de granges.
«Apparemment, les idéologues et les responsables des relations publiques de l'Ukraine d'aujourd'hui connaissaient très bien cette histoire», avait conclu Maria Zakharova au printemps 2022, accusant Kiev d'avoir «calqué» les méthodes de l'Allemagne nazie.