Le Parisien a publié ce 4 février un article sur notre couverture de la crise internationale autour de l'Ukraine, dont il ressort que notre traitement ne serait pas équilibré et partial et que notre ligne éditoriale serait influencée par le financement de notre média.
Contactés en amont par l'auteure de l'article, nous avons répondu, dans un délai très court, à l'ensemble des questions qui nous ont été posées. Pourtant, comme trop souvent, seule une petite partie de celles-ci a été utilisée dans l'article, rendant compte de façon biaisée de notre point de vue et de nos arguments.
Nous publions ici l'intégralité de cet entretien, afin que les lecteurs puissent avoir une vision complète et honnête des réponses apportées par nos journalistes.
Journaliste au Parisien : J’ai regardé plusieurs plateaux qui traitent de la crise en Ukraine et RT fait réagir des intervenants dont les positions sont assez claires : Alexandre del Valle qui intervient également régulièrement pour Valeurs Actuelles, réputé proche de la mouvance identitaire ou Pierre Lévy, directeur de la rédaction du mensuel Ruptures, dont la couverture du mois de janvier sur «Le grand mythe de l’invasion russe» donne la couleur : avez-vous un commentaire à faire sur ces intervenants/éditorialistes et sur le choix de vos invités sur la question ukrainienne ?
Stéphanie de Muru, journaliste et rédactrice en chef de l'émission «L'info avec Stéphanie de Muru» chez RT France : Ces deux invités que vous mentionnez ont des positionnements très différents sur l’échiquier politique en France et sont tous deux spécialistes de questions internationales. Ils se sont exprimés, comme de nombreux autres invités et spécialistes, par exemple monsieur Frédéric Encel ou Dominique Trinquant, d’anciens diplomates tels que Eugène Berg ou Claude Blanchemaison, qui défendent parfaitement la position occidentale, ou encore des personnalités engagées politiquement telles que Charles Prats ou François Pupponi. De nombreux points de vue sur la situation ont été apportés sur ce sujet.
Journaliste au Parisien : Est-ce que vous estimez respecter une grille objective quand la journaliste Stéphanie de Muru ouvre un débat sur l’Ukraine en lançant «Comment poursuivre le dialogue alors que les Etats-Unis répondent toujours par des menaces de sanctions ?» ?
Stéphanie de Muru : J’ajoute également «qui saura apaiser les choses ?»… j’ai absolument toujours veillé à rester objective dans le traitement de ce dossier que je sais sensible, en respectant chaque opinion, chaque point de vue. Les menaces ou promesses de sanctions par les autorités américaines sont une réalité difficile à occulter. Les déclarations officielles en ce sens sont quasi quotidiennes, particulièrement ces derniers temps, dans un contexte de tensions internationales. Poser la question de savoir si ces menaces de sanctions sont un frein à la recherche d’une solution sur le dossier ukrainien, est tout à fait légitime. Ce point précis n’est qu’un élément parmi d’autres mais il mérite d’être questionner et analyser. Les trois invités amenés à s’exprimer sur ce sujet, un porte-parole de Valérie Pécresse, un député Modem et notre grand reporter Régis le Sommier, apportent chacun un point de vue différent. Les déclarations du ministre Jean-Yves Le Drian sont mises en avant. Je vous invite à podcaster des sujets de certains nos confères qui ne donne souvent que le point de vue occidental. Pourquoi ne leur fait-t-on pas le même reproche ? Chez RT France, nous nous appliquons précisément à donner tous les points de vue et donc également le point de vue russe, ce qui pour ma part ne me pose aucun problème. Je pense par ailleurs que cela intéresse les téléspectateurs français de le connaître.
Journaliste au Parisien : J’ai été surprise de trouver une vidéo directement reprise au ministère de la Défense russe, qui montre des chars russes progresser, sans commentaire ni information additionnels. A quoi sert la publication d’une telle vidéo sur votre site ?
Jérôme Bonnet, rédacteur en chef chez RT France : Il s’agit d’exercices conjoints des armées russes et biélorusses comme c’est indiqué dans l’article dont la vidéo est une illustration. Contrairement à ce que vous affirmez de nombreuses informations sont communiquées. La date et les motivations de ces exercices sont précisées, le contexte de tensions actuel dans lequel ils sont menés est également rappelé. Cette information méritait selon nous d’être portée à la connaissance du public. L’origine de ces images est également indiquée, comme il est d'usage. Ce type d’images provient très souvent du ministère de tutelle, quel que soit le pays.
Journaliste au Parisien : Comment sont prises vos décisions concernant le traitement d’un sujet aussi brûlant et qui vous place, de fait, dans une position qu’on imagine délicate ?
Stéphanie de Muru : Les décisions sont prises de manière habituelle, en conférence de rédaction. Ce qui est délicat c’est d’essayer de respecter l’équilibre des points de vue dans une crise qui est évidemment éminemment complexe et qui ne peut avoir une lecture manichéenne, ce qui est trop souvent le cas.
Journaliste au Parisien : Pensez-vous délivrer une information qualitative et objective sur ce sujet délicat, et veiller à la présence de points de vue contradictoires ?
Stéphanie de Muru : Absolument. Et, je rajouterais que je suis même plutôt fière d’apporter aussi un éclairage que l’on trouve difficilement sur les autres médias français. L’expériences du passé nous montre encore une fois que l’histoire ne se lit pas de manière aussi simpliste qu’on veut bien nous le présenter parfois. Souvenez-vous, les origines de la guerre en Irak, née sur un mensonge américain. N’estimez-vous pas légitime, voire d’utilité publique, de présenter tous les points de vue, à partir du moment où ils sont équilibrés et multiples ?
Journaliste au Parisien : Cautionnez-vous qu’un discours comme celui-ci (sélectionné parmi d’autres lors d’un plateau RT France) : «(…) Ce qu’aimerait la Russie c’est qu’il y ait enfin des limites car une organisation ou une entité politique qui s’étend sans limite ça s’appelle (…) un empire et nous sommes perçus comme un empire qui va de plus en plus dans le précarré russe (…) c’est ce que craignent les Russes et c’est relativement légitime (…). Les Occidentaux nous avaient promis de ne jamais aller vers l’Est au-delà de la Pologne et des pays baltes.» puisse être prononcé en plateau sur votre chaîne sans intervention contradictoire ?
Stéphanie de Muru : Il n’est pas de notre rôle de journaliste de cautionner tel ou tel propos, tel ou tel discours, mais encore une fois, je le répète, de donner toutes les opinions possibles. Pourquoi font-elles aussi «mal aux oreilles» quand il s’agit de la Russie ?