La victoire de l’AKP signifie-t-elle que les Turcs recherchent une certaine stabilité ?

Alors que l’AKP d’Erdogan devrait être le grand vainqueur des législatives turques, le professeur Ronald Suny de l’Université du Michigan, estime que les électeurs peuvent avoir voté en sa faveur en raison de la tension qui règne dans le pays.

RT : Le parti d’Erdogan prétend déjà qu’il a gagné les législatives. Est-ce que vous êtes surpris par l’ampleur du soutien qu’il a reçu ?

Ronald Suny (R.S) : Je suis un peu surpris car la plupart des sondages laissaient croire qu’il s’agirait d’une répétition des élections du 7 juin, dans lesquelles le parti pro-kurde HDP avait recueilli assez de voix pour contrer la majorité de Recep Tayyip Erdogan, empêchant du coup la création d’un système présidentiel.

En fait, toute cette crise a été créée artificiellement par le président turc. Comme Erdogan n’a pas gagné les élections du 7 juin, et qu’il a, depuis, échoué de former un gouvernement de coalition, il a provoqué la tenue de ces législatives. Et pendant ce temps, il a également bombardé les Kurdes, entamé une guerre avec eux et engendré un niveau de violence qui aurait pu provoquer un retournement d’une grande partie de la population en faveur du gouvernement pour renforcer une sorte de stabilité.

RT : Et quant au HDP, est-ce que vous êtes surpris que le parti n’ait pas réussi à consolider son succès du mois de juin ?

R.S. : L’expérience de mes séjours en Turquie m’a montré qu’en fait le HDP disposait d’une base solide. Mais ces législatives ont été un peu biaisés car le HDP a eu de la peine à organiser des meetings. Nous avons vu que celui qu’il a pu tenir à Ankara a soudainement été frappé par un attentat à la bombe qui a tué une centaine de personnes. Je sais qu’à l’est du pays, dans la région du Kurdistan, les bureaux de vote ont été fermés une heure avant que dans le reste de la Turquie, ce qui a pu avoir une influence sur les résultats du vote.