Faisant fi du «politiquement correct» habituel, monsieur Cukierman a violé deux tabous la semaine dernière, au micro d’une grande radio française, dans le cadre de l’émission très écoutée de Jean-Pierre Elkabbach. Il a déclaré que les violences antisémites en France sont «toutes commises par des jeunes musulmans», rompant avec le dogme habituel attribuant la haine antisémite à l’extrême-droite française. Pire encore, il a affirmé que Marine Le Pen, Présidente du Front National, était «personnellement irréprochable» du point de vue de l’antisémitisme, même si son parti ne l’est pas selon lui.
En moins de cinq minutes il a donc transgressé deux des règles majeures structurant implicitement depuis trente ans la vie des partis français de gouvernement (UMP, UDI, PS, Ecologistes) et des grandes institutions dites représentatives des différentes composantes de la société française, «partenaires sociaux» et relais d’influence des partis susdits.
La première interdit toute dédiabolisation du Front National, compte tenu notamment de l’antisémitisme qu’on lui prête. Or on peut compter sur Marine Le Pen pour reprendre les propos de Roger Cukierman et souligner qu’accoler haine du juif et FN n’a plus désormais aucun sens.
La seconde s’oppose à l’ouverture de tout débat autour des problèmes suscités par l’immigration et l’Islam parce que, précisément, ils ne sont pas censés être des problèmes pour les Juifs ou qui que ce soit, mais «une chance pour la société française».
Roger Cukierman connaît la sanction pour ceux qui transgressent ces règles : l’ostracisme médiatique et politique.
Mais à 78 ans, sans doute a-t-il jugé qu’il avait passé l’âge de la prudence et qu’il ne devait plus se taire alors que de plus en plus de juifs français, terrorisés, sont tentés de s’exiler vers Israël. Et on ne peut que lui donner raison si l’on s’en tient aux faits. Tous les attentats commis contre la communauté juive de France l’ont systématiquement été par des hommes issus de l’Islam et de l’immigration : Mohammed Merah, les frères Kouachi, Amedy Coulibaly…etc. Ceux-ci d’ailleurs sont les successeurs d’un autre terrorisme antisémite, en provenance lui aussi du Moyen-Orient, celui qui a tué en 1980 rue Copernic, en 1982 rue des Rosiers, attentats que l’on a longtemps tenté d’attribuer à une fraction terroriste imaginaire de l’extrême-droite française.
Les vrais tabous français de l’antisémitisme tombent donc.
Non, la violence contre les Juifs n’est pas le fait de partisans de cette «France rance», comme de nombreux intellectuels et responsables politiques français de gauche aiment à considérer la France qui vote Le Pen, ou est tentée de le faire. Oui, elle est le fait d’individus issus de leur clientèle électorale , l’immigration musulmane.
Bien entendu les déclarations de Roger Cukierman, qui ont déclenché un tollé, vont encore susciter de vifs débats dans les semaines à venir. Les pressions ont déjà été énormes pour qu’il revienne sur ses propos.
Le lendemain de ses déclarations, au dîner du CRIF, boycotté par les représentants du Conseil Français du Culte Musulman (CFCM), qui ont vivement condamné ses déclarations, il a dû faire face aux remontrances feutrées de François Hollande. Le Président de la République a rappelé que la récente profanation du cimetière juif alsacien de Sarre-Union était l’acte de «Français de souche», c’est-à-dire d’Européens, non d’immigrés.
En savoir plus : Les leaders musulmans refusent d’assister au dîner du CRIF
Le Président du CRIF a accepté de mettre de l’eau dans son vin, ne relevant pas que la dite profanation, malgré sa violence symbolique, était très éloignée de la tuerie de l’hypermarché casher commise début janvier ou de l’exécution d’une fillette de trois ans à bout portant parce que celle-ci était née juive. Les actes antisémites, a-t-il dit, sont commis «dans leur écrasante majorité par des jeunes issus de l’immigration, des jeunes musulmans». Les apparences sont donc sauves : si les violences sont majoritairement commises par des personnes se réclamant de l’Islam, celles-ci n’en ont pas le monopole…Par ailleurs il a accepté de rencontrer à l’Elysée Dalil Boubakeur, recteur de la mosquée de Paris et Président du CFCM pour une réconciliation très médiatisée, avec le chef de l’Etat en médiateur. Enfin M. Cukierman a aussi répété que le FN était «infréquentable», concession de pure forme aux ayatollahs du Front Républicain.
De pure forme car la communauté juive française, dont une part croissante est tentée par le vote FN, est très divisée entre ceux qui, tel Gilles-William Goldnadel, apportent leur soutien au Président du CRIF et ceux qui, tel Daniel Schneidermann, le condamnent avec indignation. Roger Cukierman doit en tenir compte et ménager chacun. Il sait cependant que parmi les Juifs de France ceux de l’aile droite, qui partagent son analyse vis-à-vis de l’Islam, pèsent de plus en plus. Le succès éditorial d’Eric Zemmour en témoigne.
Dès lors on peut compter sur lui pour se montrer inflexible et ne pas céder aux demandes d’excuses exigées par le CFCM, quitte à démontrer que «l’esprit du 11 janvier» n’existe pas, n’a jamais existé, entre Juifs et Musulmans de France. Une poignée de main avec Dalil Boubakeur oui, un mea culpa non.